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Reviewed by:
  • Une saison en France réal. by Mahamat-Saleh Haroun
  • Marius Conceatu
Haroun, Mahamat-Saleh, réal. Une saison en France. Int. Eriq Ebouaney, Sandrine Bonnaire, Aalayna Lys. Pili, 2017.

C'est une histoire d'immigrants racontée par un cinéaste sensible au cycle des saisons—son troisième long-métrage, Saison sèche (2006), avait été primé au Festival de Venise. Premier film de Mahamat-Saleh Haroun dont l'action se déroule en France (les autres se passent dans son Tchad natal), Une saison en France reprend le thème de la guerre qui brise les destins et suit Abbas, récemment émigré de Centrafrique avec [End Page 201] ses deux enfants à la suite de troubles violents qui ont causé la mort de sa femme. Ancien professeur de français dans un lycée de Bangui, Abbas (Eriq Ebouaney) essaie de refaire sa vie et d'élever ses enfants à Paris. En attendant que sa demande d'asile soit approuvée, ils mènent une vie provisoire et pénible. Étienne, le frère d'Abbas, luimême autrefois professeur de philosophie, vit aussi à Paris dans des conditions encore plus précaires. Abbas vit une histoire d'amour avec Carole (Sandrine Bonnaire), Française d'origine polonaise, mais tout bascule lorsque la demande d'asile est rejetée et la famille n'a que trente jours pour quitter la France. Décrivant les conséquences tragiques que peut avoir sur les vies des gens le système d'immigration français, le film semble faire de la critique sociale. Pourtant, c'est l'émotion qui, dans l'arsenal narratif du réalisateur, s'avère l'arme de choix. Face à une mise en scène habile de moments tantôt ordinaires, tantôt uniques, le spectateur est inévitablement touché par la pureté des sentiments et la bonté foncière des protagonistes. On s'attache tout de suite aux enfants irréprochables et sympathiques, à l'amour d'Abbas et de Carole, au tonton Étienne (le musicien centrafricain Bibi Tanga dans un extraordinaire premier rôle) avec son air et destin de saint martyr. En termes moraux, ces gens sont profondément aimables dans le sens d'un humanisme spirituel: ils sont tous les victimes innocentes d'un système diabolique, gardant toutefois une dignité qui les mène au malheur, mais leur sauve l'âme. Dans cette histoire exemplaire pour tant d'immigrants, la mort est un phénomène cyclique, saisonnier, à la fois disparition physique et refuge dans la mémoire. Le fil rouge que tissent les symboles culturels abondants apporte une dimension universelle et éternelle, ce qui rend le film éminemment enseignable. Des livres et citations, des phrases-aphorismes, l'expérience de la foi peuvent inciter à de passionnantes discussions dans les classes de français sur les thèmes développés dans le film, à savoir la condition des immigrants, le caractère éphémère mais indispensable du bonheur, le besoin de raconter les histoires de ces vies attendant à tout moment un départ dans l'inconnu et handicapées par l'impossibilité du retour chez soi. Restent mémorables les scènes où la joie de vivre perce, ne fut-ce que brièvement, ce sentiment permanent de menace: la fête d'anniversaire de Carole, avec une danse à quatre dans l'appartement d'HLM, sur un fond de plantes rampantes qui rappellent une forêt tropicale, peut-être centrafricaine, est émouvante de domesticité, respirant un bonheur partagé et un bien-être déchirants puisque nous savons, avec les protagonistes, que tout cela n'est que temporaire, rien qu'une saison, donc d'autant plus précieux.

Marius Conceatu
University of South Dakota
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