Mauvaises herbes réal. by Kheiron (review)

Waël (Kheiron) et Monique (Catherine Deneuve) forment un couple d'arnaqueurs exploitant la galanterie des hommes dans les garages des supermarchés. Waël arrache le sac à main de Monique et s'enfuit juste devant les yeux d'un Monsieur se dirigeant vers sa voiture garée avec son caddie rempli. Le témoin—motivé par un sentiment chevaleresque ou tout simplement par son humanité—se met à poursuivre Waël qui, après une course comique, doit ralentir et jeter le sac. Le bon samaritain, se délectant de sa victoire, découvre ensuite que ses courses ont disparu avec Monique. Quant au sac, il ne contenait qu'un message, préparé d'avance:"Ça t'apprendra à aider les autres, connard!" Ce mot est la prémisse d'un film qui, de façon prévisible, mais drôle et attachante, raconte le processus de rédemption de ce couple délinquant inédit. Monique, ancienne nonne dans un pays arabe qui n'est que suggéré, avait sauvé le petit Waël qui venait de perdre sa famille lors d'un conflit militaire. Dans une série de flashbacks, nous apprenons que l'enfant a survécu à l'aide de son talent pour la duperie (il faisait semblant d'être aveugle et subtilisait des portefeuilles dans les endroits agglomérés). À présent, le fils taquine sa mère adoptive au sujet de sa vieillesse, tandis que celle-ci manoeuvre en cachette pour le mettre sur la bonne voie, convaincue depuis toujours de ses grandes qualités, dont celle de la communication avec "les jeunes en difficulté". L'arnaque du garage s'effondre lorsque la victime se trouve être Victor (André Dussollier), un ancien ami de Monique, fondateur d'une organisation qui aide les adolescents des cités à ne pas s'égarer. Waël devient gardien temporaire de six collégiens et lycéens problématiques, soit les"mauvaises herbes"titulaires ayant diverses origines et identités raciales, religieuses, sexuelles, sociales et culturelles. Dans des scènes délicieuses qui mettent en valeur l'astuce du personnage et sa générosité d'esprit, Waël devient leur confesseur, enseignant, ami. Kheiron, lui-même immigré iranien, jouant ici le rôle d'un Arabe vivant en marge de la loi et de la société, incapable de s'engager dans une relation amoureuse et aimé jusqu'à l'irritation par une mère très investie, a trouvé le ton et la technique adéquate pour traiter de thèmes lourds et controversés avec une aisance qui rend le résultat agréablement comique, ni superficiel ni hautain. Dans son premier long métrage, Nous trois ou rien (2015), le réalisateuracteur avait déjà mélangé révolution islamique, assassinats, suicides pour en sortir une comédie sociale. Mauvaises herbes pose un regard plein d'espoir sur les jeunes déshérités. Le scénario s'abstient de les peindre en victimes, préférant bâtir autour de leurs attributs et leurs qualités. Monique et Waël, les deux farceurs formant une machine à arnaquer bien huilée, parviennent trop facilement non seulement à suggestionner les autres pour arriver à leur but, mais aussi à se duper l'un l'autre. C'est parce qu'on ne saurait être vraiment manipulé à faire ce qu'il faut—aider les autres, par exemple—si la pulsion n'existe pas déjà à l'intérieur de nous.