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Reviewed by:
  • Rythme, chaos, mythologies. La physique amusante V by Jacques Réda
  • Jean-François Duclos
Réda, Jacques. Rythme, chaos, mythologies. La physique amusante V. Gallimard, 2018. ISBN 978-2-07-280254-6. Pp. 136.

L'univers est assez grand pour donner toute la place qu'elle mérite à cette étonnante série en expansion que constitue La physique amusante. Dans ce cinquième tome, Réda s'empare à nouveau de la matière, décrivant une fois de plus les lois qui régissent son fonctionnement et les mystères qu'elle continue de recéler. De poème en poème se construit la charpente d'une cosmologie aux principes entièrement rythmés par la prosodie classique. Braquant tantôt leur télescope en direction des zones les plus éloignées du ciel, tantôt leur microscope vers les éléments les plus menus de l'atome, les vers de Réda construisent un monde qu'on devine façonné par les découvertes et les hypothèses les plus en pointe chez les savants d'aujourd'hui. Et "dans le vide intergalactique ou parmi les hadrons" (124), on ne prendra pas le poète en défaut d'exactitude, même s'il admet bien volontiers n'être qu'un simple lecteur—un lecteur curieux et opiniâtre—de vulgarisation scientifique. Ce qui l'intéresse tout autant que la science, ou davantage encore, c'est habiter poétiquement le monde physique, et Rythme, chaos, mythologies se coule comme les autres volumes dans une "théorie générale" revendiquée de longue date par l'auteur. D'un côté la Vie, "entêtée et primesautière" (70), ne sachant jamais quelle direction emprunter, et qui toujours rebondit face au vide selon les règles de "l'équitable despote" qu'est le rythme. D'un autre côté le chaos, les écueils, le "violent désir assorti de dégoût" (44) qui prennent non seulement les êtres face aux catastrophes mais le monde lui-même face à l'éventualité de sa disparition. Se sachant délivré d'un souci didactique, et comprenant que "la nuit s'apprête à [le] noyer" (107), Réda se penche sur la notion de retour. Pour discuter de [End Page 228] l'hypothèse d'un univers en pulsation, il n'hésite pas à convoquer les antiques Muses et, avec elles, toute la troupe des figures humaines ou mythiques qui ont quelque chose à dire sur l'éternel recommencement des choses. Dieu lui-même est sollicité plus souvent qu'à son tour pour donner à la splendeur du monde un caractère biblique, même s'il faut préciser qu'il s'agit d'un dieu "contradictoire, athée, au sens de Jean Grosjean" (100). Dans les récits qui se dessinent, de nouvelles figurent émergent, toutes dotées d'une force mythologique capable de surmonter les contradictions de la matière: Néant et Énergie interpellent Blues et Jazz. Les lecteurs perçoivent dans ce tome l'image de plus en plus nette d'une œuvre qui n'a eu de cesse de chercher ce qui lie le ciel immense et lointain à un homme bien décidé à demeurer sur le plancher des vaches pour y danser le plus longtemps possible (107, 119). De cette lecture semble cependant poindre la possibilité d'une suspension, illustrée par l'ultime vers du recueil à la rime orpheline. Il se peut bien que Réda, à l'issue de cette longue série activement contemplative, ait enfin trouvé le sentiment d'avoir mérité un peu de repos.

Jean-François Duclos
Metropolitan State University of Denver (CO)
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