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Comme dans Le Gône du Chaâba (1986) où le protagoniste passe une bonne partie de sa jeunesse dans un bidonville de la banlieue lyonnaise, le narrateur semble avoir consommé son enfance dans un monde forestier pauvre—chaâba— qui, bien qu’il soit défavorable à une vie salubre, retient des valeurs humaines désormais en désaccord avec le monde moderne. Cette méthodologie de faire immerger quelqu’un dans un monde qui lui est nouveau met en lumière une civilisation matérialiste menant à l’excès et à la démesure. D’ailleurs, il est évident par les tournures linguistiques saugrenues et les déformations ou inventions lexicographiques auxquelles recourt le narrateur qu’il s’agit pour lui de régler ses comptes et avec le style de vie du Persolitaire et avec les gadgets magiques qui contrôlent sa vie. Il est donc question d’une dénonciation presque générale, par le Sorciologue, de la vie que mène l’homme moderne et de ce qu’il valorise de plus cher: des sucreries aux Hummers, du bronzage artificiel à “une station de ski enneigée au milieu des sables cuisants” de Dubaï (140). Rien d’autre à dire de ce récit, sauf que si l’on désire réfléchir sur le quotidien banal, c’est ici le lieu d’un rendez-vous avec une histoire où de simples expressions (la police de l’Identité Nationale) ou des acronymes (STF: Sans Toit Fixe), sans oublier le Prédisant du Nouvel Ordre et Omar qui devient Homard, donnent aux intéressés de quoi combler leur curiosité. University of Maryland, Baltimore County Zakaria Fatih CHESSEX, JACQUES. Un Juif pour l’exemple. Paris: Grasset, 2009. ISBN 978-2-246-74351-4. Pp. 112. 11,90 a. Tout comme pour Le Vampire de Ropraz (FR 82.1), Jacques Chessex s’inspire d’un fait divers qui a touché sa région natale en Suisse, cette fois en 1942, en pleine guerre mondiale. Payerne est une petite ville bourgeoise de cinq mille habitants qui vit du commerce du bétail, du tabac et surtout de la charcuterie. Malheureusement, une bonne partie de sa population souffre du chômage et de la misère en cette période de guerre. Le narrateur note un fort contraste entre l’intense beauté naturelle de cette campagne et les lâchetés des habitants: “Campagnes perdues, forêts vaporeuses à l’odeur de bête froide à l’aube, vallons giboyeux déjà pleins de brume, harpes des grands chênes à la brise tiède. [...] Mais le mal rôde. Un lourd poison s’insinue” (11–12). Selon certains, le “vampire juif” (16) a causé la crise économique locale: les Juifs prospèrent alors que les Suisses de Payerne ont la vie dure. Cet état de fait entraîne une montée de l’antis émitisme. Le pasteur Lugrin, soutenu par l’Allemagne, organise des réunions et rend le Juif responsable de tous les maux. Une vingtaine de Payernois, dont le meneur Fernand Ischi, prêtent serment au parti nazi et organisent attentats et menaces anonymes dans la région. Vient alors le moment d’un “Juif pour l’exemple”, de faire passer un message clair à la communauté juive de Suisse. Arthur Bloch, marchand de bétail et homme respectable, se fait attirer par le groupe dans une étable où on le découpe en morceaux le 16 avril 1942. Comme l’indique le narrateur, le climat historique et la montée de la haine du Juif rendent ce crime encore plus choquant: “Mais curieusement, au lieu que l’horreur de la disparition, ou l’angoisse qu’elle diffuse, éveillent la compassion ou la tristesse, un ricanement secoue encore les cafés, ironie sale, propos appuyés sur la ‘juiverie’, le ‘profit’, les commerces ‘parasites’” (76–77). Reviews 189 Chessex, qui avait huit ans lors du drame et qui connaissait les acteurs principaux , en vient alors à expliquer le pourquoi de ce livre: “Je n’ai pas tort [...] de sonder des circonstances qui n’ont pas cessé d’empoisonner ma mémoire et de m’entretenir, depuis tout ce temps, dans un déraisonnable...

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