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Reviewed by:
  • Défendre la cause de l'environnement. Une approche organisationnelle by Nathalie Berny
  • Bécot Renaud
Nathalie BERNY, Défendre la cause de l'environnement. Une approche organisationnelle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, « Res Publica », 2019, 298 p. Préface d'Olivier Borraz.

Dans cet ouvrage de science politique, Nathalie Berny propose une étude approfondie et dense de la structuration de cinq grandes organisations non gouvernementales environnementales françaises (Les Amis de la terre, France nature environnement (FNE), Greenpeace, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et le WWF France). Organisé en six chapitres thématiques, le livre propose à la fois une étude diachronique de chacune des associations considérées depuis la fin des années 1960, tout en explorant plusieurs phases qui cristallisent des mutations internes, en particulier dans la foulée du « Grenelle de l'environnement » (2007).

Le point de départ de la recherche réside dans une interrogation et une insatisfaction quant à l'hypothèse d'une « convergence des pratiques et des formes organisationnelles » (p. 252) des associations d'environnement. En effet, l'auteure présente cette thèse de la convergence comme « la conception dominante de l'institutionnalisation promue par une partie de la sociologie des mouvements sociaux » (p. 9). En prenant le contre-pied de cette démarche, elle invite à comprendre l'évolution de ces associations en fonction de critères endogènes. Pour cela, Nathalie Berny convoque prioritairement des travaux fondateurs de la sociologie des organisations, dans la foulée des réflexions de Philippe Selznick. Le premier chapitre de l'ouvrage livre ainsi une présentation méthodologique rigoureuse, explicitant les choix opérés. L'institutionnalisation des ONG environnementales proviendrait de l'élaboration et de l'affirmation d'une « compétence distincte », que l'auteure définit comme « l'articulation entre les différentes activités que les organisations construisent au cours de l'action » (p. 10). En utilisant un recueil documentaire sur chaque organisation (incluant des publications externes et des [End Page 160] notes internes), ainsi que quarante-sept entretiens, les chapitres suivants offrent deux apports majeurs aux travaux de socio-histoire des organisations et aux études environnementales.

En premier lieu, l'étude sociologique fine proposée par l'auteure illustre avec force la manière dont les organisations renforcent leurs compétences en se confrontant à des événements contingents comme à des sollicitations externes, à commencer par celles des pouvoirs publics. Le deuxième chapitre de l'ouvrage porte l'attention sur les moments fondateurs des ONG et leurs « expériences critiques », c'est-à-dire les événements ou les conflits au cours desquels les membres d'une association façonnent « des perceptions partagées sur les stratégies à mettre en oeuvre pour défendre une cause commune » (p. 82). Ces expériences peuvent recouvrir aussi bien la lutte pour le sauvetage des oiseaux marins lors de la marée noire du Torrey Canyon (1967) pour les bénévoles de la LPO que la participation à la campagne électorale de René Dumont (1974) pour les Amis de la terre. Aussi différentes soient ces expériences, elles marquent l'identité des associations et les savoir-faire légitimes au sein des ONG : depuis l'expertise ornithologique de la LPO jusqu'à la capacité d'orchestrer des actions collectives médiatiques des Amis de la terre.

À l'issue des années 1970, la stabilisation d'une administration publique de l'environnement se réalise en dépit de moyens financiers et humains limités. Ce ministère sollicite alors les associations, qui peuvent représenter des leviers pour la mise en oeuvre des politiques publiques. Pour la plupart des associations étudiées, à l'exception notable du WWF, la part des financements publics dans le budget global devient considérable : en 1981, ces subventions représentent six fois le montant des cotisations d'adhérents pour la Fédération française des sociétés de protection de la nature (FFSPN, devenue FNE en 1990). Ces financements métamorphosent les organisations : ainsi, la FFSPN se réorganise autour de « contrats d'objectifs » thématiques qui contribuent à répondre de manière plus précise aux attentes administratives. Toutefois, c'est...

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