Transculture, société et savoirs dans les Amériques by Adina Balint, et Daniel Castillo Durante (review)

Adoptant l'esprit des études comparées, ce volume collectif bilingue (françaisanglais) offre des articles d'approches variées, mais tous centrés sur les Amériques dont ils couvrent différents aspects littéraires, cinématographiques et culturels. L'un des objectifs de cet ouvrage est de souligner l'importance des travaux de Patrick Imbert dans les études comparées, en particulier ses efforts sans relâche pour trouver des solutions au binarisme dans l'étude de la littérature, de la culture et de la société. Transculture, société et savoirs dans les Amériques constitue un hommage au parcours d'Imbert et souligne sa contribution à l'enrichissement des paradigmes d'analyse de l'interculturalité, du multiculturalisme et du transculturel, dont le problème de fond est non seulement la reconnaissance de l'autre, mais aussi l'interaction avec celui-ci, dont il faut tenir compte des complexités.

Les onze articles du volume sont regroupés en quatre parties distinctes. La première, intitulée "La transculture: Traversées conceptuelles," comporte quatre articles au contenu théorique. En ouverture, "Signes filmiques du 'jeu à somme non nulle': La singulière traversée d'un otage de la dictature uruguayenne," de Fernando Andacht, se penche sur le documentaire El círculo de José Pedro Charlo et Aldo Garay. À partir de la sémiotique de Pierce et de la théorie de la mimesis d'appropriation imbertienne, l'analyse d'Andacht montre le dépassement de la vision dualiste de la société uruguayenne des années soixante-dix, foncièrement fragmentée, pour en arriver à une représentation plus complexe dans laquelle les acteurs sociaux opposés (autrefois ennemis) retrouvent un rapport à l'autre et deviennent des semblables, ainsi rejoints par une culture de tolérance. Pour Andacht, l'interculturalité s'impose alors, abandonnant derrière elle le sectarisme et la polarisation de la société.

Le deuxième article, "Transnational Imaginary Geographies in the Americas" d'Amaryll Chanady, dessine une trajectoire des imaginaires de la frontière au vingtième siècle, et s'organise en deux parties. La première porte sur le roman On the Road de Jack Kerouac, qui conçoit la frontière à partir du binarisme entre le Mexique (l'espace de jouissance tropical, le lieu de la sauvagerie naïve) et les États-Unis (l'espace de l'homme civilisé). La deuxième partie porte sur le roman de Sandra Cisneros Caramelo, et se penche sur l'exemple des États-Unis et du Mexique pour définir la frontière comme partie d'une géographie transnationale diverse dans un monde globalisé. Chanady conclut que Cisneros brise les stéréotypes développés par Kerouac pour proposer une notion de frontière plus riche, complexe, et remplie de contradictions—en somme, un palimpseste transculturel plein de diversité.

Les deux autres articles de la première partie sont centrés sur l'apport de Patrick Imbert aux études littéraires et culturelles. Le premier, "Narrativités et Amériques: De l'exclusion à l'inclusion," écrit par Patrick Imbert lui-même, est généreux en exemples d'œuvres littéraires des Amériques et universelles, soulignant la nécessité d'interpréter les premières à partir d'une vision interculturelle qui permette l'inclusion. Étant donné la complexité du contexte culturel et social des Amériques, Imbert explore plusieurs modèles de lecture tout en concluant sur le besoin de valoriser le multiculturalisme et l'interculturalité en tant que pratique de l'altérité, celle-ci s'avérant nécessaire pour arriver à comprendre le continent américain. Le dernier article de la première partie, "Dynamique du continu et du discontinu: Créativité et émergence des savoirs" d'Adina Balint, explore les relations entre les travaux théoriques d'Imbert et ses romans. Balint établit des liens entre...