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  • Conte et histoire (1690–1800) by Marc Hersant, Régine Jomand-Baudry
  • Magali Fourgnaud
Conte et histoire (1690–1800). Sous la direction de Marc Hersant et Régine Jomand-Baudry. (Rencontres, 305; Le Dix-huitième siècle, 21.) Paris: Classiques Garnier, 2017. 464 pp.

Cet ouvrage collectif explore les relations dialogiques qu’entretiennent à l’âge classique le conte et le récit historique, champ jusqu’alors très peu exploré. Le volume s’ouvre sur des questions de poétique historique à travers les exposés de la pensée de Lenglet-Dufresnoy (Jan Herman) et de Pierre Bayle (Michèle Bokobza-Kahan), soulevant les problèmes non seulement esthétiques, mais aussi éthiques que pose le mélange des deux genres. Philippe Hourcade interroge la contemporanéité du développement du conte de fées et de l’historiographie sous le règne de Louis XIV. Marc Hersant montre comment Voltaire, qui a pratiqué l’ensemble des genres narratifs, maintient une rupture nette entre récit de fiction et récit historique. Myrtille Méricam-Bourdet et Adrien Paschoud enquêtent sur les rapports de contiguïté entre fiction et histoire, dans les contes orientaux de Montesquieu et dans un conte philosophique de Diderot. Jean-Paul Sermain propose de son côté une analyse éclairante de l’événement historique que fut la publication du célèbre recueil de [End Page 453] Perrault, Contes ou histoires du temps passé (1694). La deuxième partie de l’ouvrage étudie les différentes formes d’influence de l’histoire dans le conte, des premiers recueils des contes de fées (Perrault, Lhéritier, d’Aulnoy) examinés par Anne Defrance aux contes de la Révolution présentés par Françoise Gevrey, en passant par les contes russes (Marina Guister). L’insertion de l’histoire dans le conte devient même, pour Jean-François Perrin, un indice générique du conte oriental. S’appuyant sur quatre contes ‘à visée philosophique et morale’ (p. 146) du siècle des Lumières, Aurélia Gaillard montre de manière convaincante comment le conte, en particulier dans son traitement de la guerre, témoigne de l’émergence d’une nouvelle conception de l’histoire au dix-huitième siècle, non plus événementielle, mais une histoire des passions et des caractères voire une histoire économique. Les approches monographiques de la troisième partie mettent en évidence la permanence de la réflexion sur les frontières et la porosité entre conte et histoire chez des conteurs reconnus, comme Mlle Lhéritier (Jean Mainil) ou Perrault (Ute Heidman), ou moins connus, comme Mme de Gomez (Raymonde Robert). Chez Crébillon, le dialogue entre le conte et l’histoire contribue au développement d’une théorie sur la poétique du conte (Régine Jomand-Baudry) ainsi qu’à une triple émancipation esthétique, littéraire et politique (Violaine Géraud). Chez Sade, conte et histoire se rejoignent dans la ‘poétique hybride’ (Catherine Ramond, p. 321) de ses romans, car ils mettent en scène les peurs primitives et les mystères de l’âme humaine. Se focalisant sur l’influence du conte sur l’écriture de l’histoire, la quatrième partie s’ouvre sur deux analyses des enjeux stylistiques et idéologiques de l’anecdote, menées par Karine Abiven et Riccardo Campi. Les articles suivants examinent la manière dont l’imaginaire des contes envahit et infléchit les écritures biographiques (Damien Fortin) et mémorielles, chez Saint-Simon (Damien Crelier) et chez l’abbé de Choisy (Claire Quaglia). François Raviez montre enfin comment le Prince de Ligne trouve dans le plaisir de conter un antidote à la Terreur. L’ensemble de ces vingt-quatre contributions expose ainsi la richesse et la complexité des rapports entre histoire et fiction à l’époque classique.

Magali Fourgnaud
Université de Bordeaux
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