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  • La Revanche des villages: essai sur la France périurbaine par Éric Charmes
  • Edward Ousselin
La Revanche des villages: essai sur la France périurbaine. Par Éric Charmes. (La République des idées.) Paris: Seuil, 2018. 112 pp.

Le terme ‘périurbain’, qu’on ne rencontrait autrefois que dans des études spécialisées, comme celles de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), est désormais couramment utilisé, à tel point que le processus de périurbanisation revient régulièrement dans les discours de géographes, d’économistes ou de sociologues en tant que facteur explicatif, voire déterminant, des transformations sociopolitiques que connaît [End Page 657] la société française depuis une trentaine d’années. En particulier, les thèses de Stéphane Guilluy, dont le livre le plus connu est La France périphérique: comment on a sacrifié les classes populaires (Paris: Flammarion, 2014), ont suscité un large écho médiatique. Selon Guilluy, les ‘fractures’ sociales entre les grands centres urbains, dont la prospérité est bâtie sur un secteur tertiaire orienté vers la mondialisation, et les zones périurbaines et rurales, marginalisées et pénalisées par la disparition progressive des emplois dans les secteurs secondaire et primaire, ont abouti à une précarisation croissante des classes moyennes et populaires. S’opposeraient donc une France urbaine, entreprenante et multiculturelle, et une France périphérique en déclin économique, se raccrochant par réaction à des valeurs nationalistes et xénophobes. Dans son ouvrage, Éric Charmes prend en compte cette analyse, mais s’en démarque nettement. Partant des études de l’INSEE, qui révèlent qu’environ un quart de la population française actuelle habite dans les zones périurbaines, Charmes affirme que l’opposition traditionnelle entre les villes et les campagnes est révolue. Les zones urbaines comme les zones rurales ont été transformées par le processus de périurbanisation, qui pour beaucoup d’habitants représente le rêve de ‘la ville à la campagne’. La concentration des richesses dans les centres-villes, que dénonce Guilluy, ne concerneraient que certaines grandes métropoles. Autour de la plupart des villes moyennes, par contre, les périurbains, qu’ils soient actifs ou retraités, cumulent les avantages de la ville (emplois qualifiés, logements modernes, services publics) et de la campagne (plus d’espace personnel, moins de bruit et de pollution). Les zones périurbaines sont par ailleurs diversifiées au niveau économique, tout comme le sont les quartiers des grandes villes. La prospérité et même la mixité sociale ne se limitent donc pas aux grands centres urbains. Dans une certaine mesure, l’exode rural qui avait longtemps accompagné la croissance économique en France s’est inversé. S’il est excessif de parler d’exode urbain, l’extension des zones périurbaines a métamorphosé et dynamisé des villages autrefois en déclin, et qui s’insèrent désormais dans un maillage hétérogène de zones d’habitat et d’activité économique, une situation que Charmes qualifie d’hybridation du rural et de l’urbain. Si la périurbanisation ne correspond pas à la nette division binaire décrite par Guilluy, ses effets ne sont pas pour autant toujours positifs. Plusieurs petites communes périphériques, souvent les plus prospères, cherchent à limiter leur intégration à un réseau administratif qui est le plus souvent dominé par le poids démographique des grands centres urbains. Charmes consacre un chapitre au nouveau ‘pouvoir des villages’, ainsi qu’au rôle politique des départements. Ce livre, court mais fort dense, technique tout en restant accessible, mérite d’être lu par un large public.

Edward Ousselin
Western Washington University
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