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  • La Presse canadienne-française et l’extrême droite européenne: 1918–1945 par Hugues Théorêt
  • Dominique Laporte
La Presse canadienne-française et l’extrême droite européenne: 1918–1945. Par Hugues Théorêt. Québec: Septentrion, 2018. 334 pp., ill.

Issu d’une thèse de doctorat en histoire déposée à l’Université d’Ottawa, cet ouvrage donne une vue d’ensemble des points de vue de journalistes canadiens-français sur les régimes totalitaires européens au cours de la période comprise entre l’accession au pouvoir de Mussolini en 1922 et la chute du IIIe Reich en 1945. Pour désigner son sujet d’étude, Hugues Théorêt évite le terme ‘fascisme’ au profit d’une appellation plus générale, ‘droites radicales’, qui s’applique globalement aux mouvements incarnés principalement par Mussolini en Italie, Hitler en Allemagne, Franco en Espagne et Salazar au Portugal. Ces droites radicales sont diversement interprétées dans la vingtaine de périodiques dépouillés et répartis dans le ‘spectre idéologique’ (p. 13) du Canada français: extrême gauche communiste (Clarté); gauche catholique (La Relève, Jeunesse); gauche antifasciste (Le Jour, L’Ordre); centre droit (La Presse, La Patrie, Le Soleil, Le Canada, La Revue moderne); droite nationaliste et catholique (Le Devoir, Le Droit, L’Action catholique, L’Action française, L’Action nationale); extrême droite (les journaux antisémites d’Adrien Arcand). S’appuyant sur un corpus de 690 textes journalistiques qu’il cite abondamment, Théorêt retrace chronologiquement l’évolution des positionnements idéologiques qui se croisent ou divergent au fil d’une actualité européenne relayée par des dépêches. La ‘Marche sur Rome’ de Mussolini en 1922, l’accession au pouvoir d’Hitler, nommé chancelier du Reich en 1933, la dictature de Salazar dans une moindre mesure, la Guerre civile espagnole (1936–39) et la crise de la conscription au Canada pendant la Seconde Guerre mondiale sont couvertes et interprétées non seulement par des figures marquantes du journalisme canadien-français (Georges Pelletier, du Devoir, Jean-Charles Harvey, du Jour, André Laurendeau, de L’Action nationale), mais aussi par des rédacteurs anonymes ou tombés dans l’oubli qui suivirent la ligne éditoriale stable ou fluctuante de leur organe de presse. Sauf exceptions, l’appui des journalistes canadiens-français à Mussolini et à Franco, d’un côté, et leur rejet d’Hitler, de l’autre, s’inscrivent dans un contexte où le cléricalisme et l’anticommunisme se radicalisent sous le gouvernement de Duplessis, élu premier ministre du Québec en 1936, et imprègnent leurs discours sur ces dictateurs européens et sur leurs positionnements respectifs vis-à-vis du Vatican et des catholiques (accords du Latran de 1929; Concordat de 1933, violé par Hitler en 1937), d’une part, et de la ‘menace communiste’ pendant la guerre d’Espagne (Axe Rome–Berlin, 1936), de l’autre. Le rapprochement de textes analogues entraîne des citations redondantes et des redites, mais les conclusions nuancées des six chapitres de l’ouvrage synthétisent les tendances idéologiques et journalistiques au cours des périodes étudiées. Le rapport entre la défense du corporatisme social au Québec et le parti pris favorable au régime mussolinien ressort toutefois moins nettement de la démonstration que l’anticommunisme pendant la guerre d’Espagne. Un dépouillement de journaux régionaux du Québec et de la presse canadienne-française de l’Ouest aurait peut-être pu élargir la perspective de recherche, qui reste axée sur la culture journalistique de centres urbains (Montréal, Québec, Ottawa), mais le corpus établi et étudié minutieusement par l’auteur témoigne amplement de la polarisation de la presse canadienne-française au rythme saccadé de l’actualité internationale. [End Page 652]

Dominique Laporte
University of Manitoba
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