In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • L’Amérique posthume: réinventions littéraires de l’Amérique à la fin du xviiie siècle par Benjamin Hoffmann
  • Edward Ousselin
L’Amérique posthume: réinventions littéraires de l’Amérique à la fin du xviiie siècle. Par Benjamin Hoffmann. (L’Europe des Lumières, 61.) Paris: Classiques Garnier, 2019. 396 pp., ill.

Les ‘réinventions littéraires de l’Amérique’ qui sont examinées dans cette étude ont été produites par trois écrivains français, dont deux sont célèbres: Saint-John de Crèvecœur, auteur des Lettres d’un cultivateur américain (1784); Lezay-Marnésia, dont les Lettres écrites des rives de l’Ohio (1800) sont beaucoup moins connues; et Chateaubriand, qui figure ici surtout en tant qu’auteur du Voyage en Amérique (1827) et des Mémoires d’outre-tombe (1848). Dans son Introduction, Benjamin Hoffmann explique le choix du terme ‘posthume’: les représentations qu’il étudie chez ces trois écrivains ont pour but de faire ‘revivre une époque de l’histoire qui est déjà terminée lorsque l’auteur qui l’a connue prend la plume’ (p. 14). De plus, l’exactitude historique ne constitue pas l’objectif principal de ces textes. Il s’agit plutôt d’un processus de remémorisation effectué parfois de longues années après le voyage ou le séjour de l’écrivain en Amérique. Ce processus ‘prend le plus souvent la forme d’une idéalisation rétrospective résultant de suppressions et d’ajouts opportuns qui permettent d’illustrer la félicité supposément parfaite d’un pays qu’il n’est désormais possible d’habiter que par l’effort du souvenir’ (p. 15). Hoffmann commence par la vie et le périple transatlantique de Saint-John de Crèvecœur, qui est passé par l’Angleterre, puis la Nouvelle-France, avant de s’installer en Amérique, où il fonde une famille et devient fermier. Vers la fin de la Guerre d’Indépendance américaine, il revient en France (ce qui ne l’empêchera pas de brièvement retourner en Amérique en tant que consul français). Parlant et écrivant couramment l’anglais, cet auteur se fait connaître en 1782 en publiant Letters from an American Farmer, un ouvrage qui lui vaut une grande célébrité et qu’il réécrira en français, en 1784 puis en 1787. Hoffmann compare les différentes versions de [End Page 121] cette œuvre, dont le volume augmente au fur et à mesure que s’éloigne dans le temps le passé réel de l’auteur en tant qu’agriculteur américain et que des souvenirs en grande partie nostalgiques le remplacent. Alors que Crèvecœur avait longtemps vécu et travaillé en Amérique durant la fin de la période coloniale, Lezay-Marnésia (1735–1800), noble libéral ayant siégé aux États-Généraux, a passé deux ans dans ce qui était devenu les États-Unis. Sa tentative de fonder une communauté utopique sur les bords de l’Ohio s’étant révélée infructueuse, ‘en mai 1792, c’est abattu et ruiné qu’il retrouve la France’ (p. 164). La reconstruction mémorielle que l’on trouve dans ses Lettres offre un exemple d’une ‘conjonction entre l’exotisme américain et la nostalgie pour une époque révolue’ (p. 225). Quant au bref séjour américain de Chateaubriand en 1791, il constitue une source d’inspiration pour une grande partie de son œuvre littéraire. Tout comme ses prédécesseurs, Chateaubriand ‘réinvente l’Amérique à mesure qu’il se la remémore’ (p. 245). Solidement documenté, rigoureusement argumenté, le livre de Hoffmann intéressera tous ceux qui étudient les représentations littéraires de l’Amérique coloniale et des États-Unis.

Edward Ousselin
Western Washington University
...

pdf

Share