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Reviewed by:
  • La Révolution dans l’ordre. Une histoire du duplessisme by Jonathan Livernois
  • Alexandre Turgeon
Livernois, Jonathan – La Révolution dans l’ordre. Une histoire du duplessisme, Montréal, Boréal, 2018, 256 p.

Soixante ans après son décès, Maurice Duplessis continue de poser problème pour l’historiographie québécoise. Si de plus en plus d’historiens, de sociologues, de politologues et autres -logues s’intéressent à l’homme et à son régime, l’étudiant sous plus d’une couture, force est d’admettre qu’il n’est pas aisé de dépasser la dichotomie Grande Noirceur/Révolution tranquille à laquelle le « cheuf » est étroitement associé. Ce n’est pas faute d’essayer. Ces dernières années, des thèses intéressantes et audacieuses ont été mises de l’avant par Lucia Ferretti et Éric Bédard, entre autres. La première avançait ainsi l’idée que la Grande Noirceur serait en fait la mère de la Révolution tranquille, tandis que le second suggérait de passer outre à la dichotomie tout entière en proposant une autre chronologie – la Reconquête tranquille (1939–1967) – à même de faire l’économie de la Grande Noirceur et de la Révolution tranquille. Ces tentatives, pour peu qu’elles aient été fructueuses dans leur manière de reconsidérer la période, témoignent toutefois de l’intérêt qui subsiste pour les années d’après-guerre au Québec, et pour Maurice Duplessis en particulier.

Professeur d’histoire littéraire et intellectuelle à l’Université Laval, Jonathan Livernois apporte sa contribution au débat. Il s’agit d’une synthèse pour le moins remarquable, écrite dans un style enjoué et dilettante, la plume un brin moqueuse. À maintes reprises, le lecteur ne pourra s’empêcher de sourire devant telle saillie, telle remarque de l’auteur – jamais impertinente –, tout en appréciant à sa juste valeur l’ambitieux survol qu’il propose de Duplessis et du duplessisme tout à la fois. Les spécialistes du sujet resteront toutefois sur leur faim, car on y apprend bien peu de choses, en fin de compte – format de la synthèse oblige; ils auraient néanmoins tort de se priver d’une lecture aussi agréable qu’érudite. [End Page 400]

Dès l’introduction, Livernois annonce ses couleurs : « Il faut prendre position », dit-il (p. 15). Fort bien. Mais du même souffle, le voici pourtant qui déclare préférer personnellement « la vision héroïque de la Révolution tranquille à cette perspective du repli, du petit train va loin, du Québec engourdi » (p. 14). Entre deux maux, il est vrai qu’il faut choisir le moindre – à défaut d’avoir trouvé le remède au mal en question… Voyons néanmoins de quoi il en retourne.

Cette histoire du duplessisme se décline en quatre chapitres pour le moins éclatés, dans un trait qui n’est pas sans rappeler le portrait morcelé de Duplessis utilisé en couverture. Le premier chapitre est ainsi doté de balises chronologiques qui annoncent une étude biographique – de 1890, année de naissance de Duplessis, à 1944, lorsque celui-ci renoue définitivement avec le pouvoir. Il s’agit pour l’auteur de camper son sujet, de revenir sur son parcours et de souligner quelques-uns de ses faits d’armes – sa performance au Comité des comptes publics, notamment – ainsi que sa défaite crève-cœur, en 1939. Avant de passer aux années 1944–1959, les années de la Grande Noirceur – de la Grande Noirceur duplessiste, pourrait-on dire –, Livernois s’est employé à dresser le bilan historiographique du duplessisme. Dans ce chapitre, l’auteur montre son érudition tout autant que ses qualités de vulgarisateur, lui qui traite d’une imposante production historienne, sociologique, littéraire et autre, du début des années 1960 jusqu’à nos jours.

Au troisième chapitre, Livernois retourne à Duplessis pour mieux comprendre sa longévité politique. Forcément, les élections et la caisse électorale de l’Union nationale retiennent son attention, mais il porte également son regard sur les rouages de l’administration...

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