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  • Congo Inc. Le Testament de Bismarck d’In Koli Jean Bofane : Fiction postmoderne d’une Afrique postcoloniale aux prises avec les ombres de la mondialisation
  • Dacharly Mapangou

Faut-il avoir peur de la mondialisation ? La mondialisation est-elle heureuse ou malheu-reuse ? […] Il n’empêche, la réponse en ressort toujours ambiguë : la mondialisation n’est pas idéale, car elle reste gouvernée par les rapports de forces, et ces derniers, d’essence nationale, sont aveugles à l’intérêt international général. Les conditions du développement sont certes inégales, mais certains pays, sans ressources naturelles, se portent bien, alors que d’autres, qui ont tout pour réussir, n’y parviennent pas.

(Godet 81–82)

Mondialisation et fiction africaine de la postmodernité et de la postcolonialité1

S’il est un champ littéraire qui se constitue assurément comme lieu d’accueil de la mondialisation dans toutes ses incarnations, c’est bien celui de la fiction africaine postmoderne et postcoloniale.2 Au demeurant, nous repérons, dans ledit champ, des fictions3 qui offrent au lecteur, d’un point de vue thématique, une toile narrative, descriptive et discursive rendant compte du contexte politique, économique, militaire, technologique et culturel dans lequel se trouverait actuellement la majorité des pays d’Afrique « mondialisés » ou « mondialistes ». Bien entendu, en tant que phénomène qui concerne avant tout l’homo economicus, qui est devenu [End Page 45] la grande obsession des temps modernes et qui reste une gageure pour un grand nombre de pays pourvus de ressources en matières premières et qualifiés de « pays en développement », la mondialisation fait partie intégrante de la dynamique interne de la fiction littéraire contemporaine. D’ailleurs, ne lisons-nous pas sous une plume comme celle de Maylis de Kerangal :

Quelle que soit la nature du pacte qui les unit, le roman « provoque » le monde et réciproquement. C’est précisément ce mouvement de réciprocité, quasi chimique, qui conduit le roman contemporain à faire trace de la mondialisation, à se frotter à elle, à se saisir de ce phénomène tout autant que, simultanément, à être saisi par lui. […] Le roman est sans doute le genre littéraire le mieux à même de rendre manifestes les mécanismes de l’économie mondialisée, ses flux, ses échanges, et leurs effets sur la vie de la planète et de tout ce qui la peuple. […] Qu’elle soit le sujet même du livre, que la description frontale de l’un de ses secteurs en soit le projet littéraire […], ou qu’elle entre dans le livre par capillarité, pour seulement le colorer ou finalement l’envahir […], la mondialisation contamine le roman. […] Ecrire la mondialisation s’apparente alors à une traversée des zones mondialisées…

(« Le chantier »)

Cette déclaration de Maylis de Kerangal, qui fait figure d’évidence lorsqu’il s’agit du roman contemporain face à la mondialisation, paraît s’appliquer à tous les romans de la République des lettres. En effet, conçu comme une mathésis,4 le roman contemporain est, de facto, en prise directe avec l’imaginaire de la mondialisation.5 Ainsi, en paraphrasant cette allégation de Louis Aragon selon laquelle « le moderne est le point névralgique de la conscience d’une époque : c’est là qu’il faut frapper » (58), nous affirmons que la mondialisation est le point névralgique de l’émergence d’une nouvelle conscience planétaire, de la promotion dans le monde contemporain d’une nouvelle idée ou configuration de la société. C’est donc une évidence : la mondialisation constitue le sol, le théâtre sur la scène duquel se joue véritablement l’avenir du monde contemporain global dans lequel sont entrés presque tous les pays de notre planète. Sans doute Ignacio Ramonet a-t-il raison de soutenir que « tous les Etats sont entraînés dans la dynamique de la mondialisation. [Mondialisation qui s’érige] en quelque sorte [en] une seconde révolution capitaliste [et qui] touche les moindres recoins de la planète, ignorant aussi bien l’indépendance des peuples que la...

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