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  • Théâtre dialectique postcolonial: Aimé Césaire et Derek Walcott par Jason Allen-Paisant
  • Anne Douaire-Banny
Théâtre dialectique postcolonial: Aimé Césaire et Derek Walcott. Par Jason Allen-Paisant. (Études sur le théâtre et les arts de la scène, 7.) Paris: Classiques Garnier, 2017. 267 pp.

Jason Allen-Paisant contribue à réduire la lacune des travaux universitaires rapprochant Aimé Césaire et Derek Walcott, après la thèse remarquée de Malik Noël-Ferdinand ('Omeros, Aimé Césaire, la mer: paysages du détour dans la poésie de Derek Walcott', Université Paris III, 2010) et c'est en utilisant un troisième pilier de la pensée caribéenne contemporaine qu'il s'y attache. Édouard Glissant en effet, quoiqu'il ne soit pas mentionné dans le titre de l'ouvrage, en sous-tend l'architecture visible et l'Introduction explicite cette orientation. En des énoncés efficaces et concis (parfois au risque de simplifications), Allen-Paisant rapproche d'emblée la Relation et la dialectique hégélienne, la première empruntant à la seconde sa dynamique puissante; c'est de et par la fouille du 'lieu incontournable' (Glissant) qui peut survenir la co-naissance au monde. L'ouvrage se focalise sur le théâtre de Césaire et Walcott, sans ignorer leur poésie—et c'est heureux, ces deux pans de leur création étant indissociables. Une première partie solide pose les outils théoriques (Hegel et Brecht notamment) permettant de lire la 'genèse d'un théâtre épique caribéen'; c'est aussi le moment de la comparaison maintenue entre Césaire et Walcott, les parties suivantes d'une trentaine de pages chacune sur 'Le Gouffre' (pour la 'représentation de la mémoire du traumatisme', p. 233), 'Le Corps' et 'Le Temps-Espace' (pour montrer, à travers le corps et son inscription dans le temps et l'espace la quête [End Page 331] inquiète et résolue de mythes fondateurs), empruntant pour les deux premières majoritairement à Walcott, la dernière surtout à Césaire et pouvant être lues comme des articles pertinents sur chacun de ces sujets. L'ensemble est convaincant et offre une belle proposition de lecture de ces deux œuvres théâtrales dont l'enjeu et la portée excèdent la seule Caraïbe. L'usage de Hegel, de Brecht et surtout de Glissant permet de lire ces pièces comme étant l'expression de 'l'acceptation du vide et du traumatisme comme éléments constitutifs de l'esthétique caribéenne [. . .] et de la capacité de l'imagination à redéfinir le passé et le présent en mobilisant les potentialités créatrices de ces forces négatives' (p. 233). L'ensemble évite l'écueil de l'enfermement dans la sphère caribéenne et montre la modernité de ces deux écritures aussi profondément enracinées qu'elles disent un monde ouvert, diffracté, polyphonique, Relationnel, en perpétuel déplacement. Ce n'est pas la moindre des qualités de cet ouvrage que d'ajouter Walcott et Césaire dans le corpus des œuvres permettant de mieux appréhender la modernité du monde tel qu'il est.

Anne Douaire-Banny
Institut Catholique de Paris / Université Rennes 2
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