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Reviewed by:
  • Dustan superstar par Raffaël Enault
  • Thomas Liano
Dustan superstar. Par Raffaël Enault. Paris: Robert Laffont, 2018. 316 pp., ill.

Après la parution du premier volume de ses Œuvres (Paris: P.O.L., 2013), cette première biographie de Guillaume Dustan confirme le regain d'intérêt justifié pour les écrits encore méconnus de l'auteur. Porté par un projet ambitieux à mi-chemin entre le Sur Nietzsche de Georges Bataille (Paris: Gallimard, 1945) et le Saint Foucault de David M. Halperin (Oxford: Oxford University Press, 1997)—Raffaël Enault y annonce écrire sur Dustan pour 'qu'on puisse l'aimer ou le détester, puis qu'on puisse m'aimer ou me détester, par extension, comme si nos personnages étaient devenus indissociables' (p. 19)—l'ouvrage au titre détonnant déçoit par sa forme finalement assez conventionnelle, marquée par une alternance non poreuse entre des chapitres biographiques et de courts 'journaux'. Sans grand intérêt structurel ou narratif, ces rares parties autobiographiques, les enquêtes du biographe auprès des proches de Dustan, s'oublient rapidement au fil de la lecture du cœur de l'ouvrage: un récit chronologique et linéaire de la vie de William Baranès, dit Guillaume Dustan. Riche en témoignages, correspondances et inédits parfois reproduits, l'ensemble bien documenté répond ainsi honnêtement à ses—tout de même discutables—intentions annoncées: celle de 'dénouer les fantasmes des faits' (p. 24) et celle de constituer une sorte de 'généalogie' (p. 130) de l'œuvre de Dustan. Sérieux dans son référencement, le livre qui produit par exemple une utile bibliographie des écrits de—et sur—Dustan, pêche cependant du point de vue de ses analyses artistiques et sociétales. Passant très rapidement sur les inédits comme sur les films peu connus de l'artiste, n'offrant que des résumés des ouvrages publiés, il échoue à montrer les forces et faiblesses de l'ensemble et s'attache surtout à des détails factuels comme les statistiques de vente ou la [End Page 323] réception médiatique. Centrée sur la figure de Dustan—de son enfance d'élève brillant à ses études à l'École nationale d'administration, en passant par sa sulfureuse persona publique—, la biographie ne situe pas assez l'auteur dans la société qui l'entoure: s'il y est présenté comme un être marginal, le centre dont il serait exclu demeure cependant souvent insaisissable; un point sans doute justifiable, mais qui ne devrait pas rester non adressé. D'une lecture aisée et d'une organisation claire, l'ouvrage offre une base factuelle solide qui aurait nécessité un peu plus de rigueur: si le style parfois poussif est excusable, de nombreuses divisions théoriques peu compatibles avec la pensée de Dustan—entre 'le monde de la pensée et de la marge' et 'la dictature des émotions' (p. 257) ou entre l'œuvre 'd'autofiction à caractère pornographique' et celle de 'polémiste societal et politique' (p. 195)—demeurent dommageables à la justesse de l'ensemble.

Thomas Liano
University College London
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