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  • Petite histoire de l'embaumement en Europe au XIXe siècle par Nicolas Delestre
  • Sandra Menenteau
Petite histoire de l'embaumement en Europe au XIXe siècle Nicolas Delestre, préfaces de Philippe Charlier et Michel Guénanten Neuilly-lès-Dijon : Le murmure, 2017, 90 p., 9,00 €

L'embaumement est un combat contre l'inéluctable, la plus ou moins lente disparition de l'enveloppe corporelle sous l'action des multiples agents de la décomposition morbide. Le court ouvrage que Nicolas Delestre consacre à l'histoire de l'embaumement met en lumière quelques-unes des figures de proue européennes de cette lutte menée au 19e siècle. Il s'attache en outre à décrire les techniques mises au point et les produits élaborés pour enrayer la marche de cette dégradation corporelle.

Le chapitre introductif offre des éléments historiques sur les premiers cas connus d'embaumements non pas naturels, par dessiccation comme dans certains milieux secs et arides, mais résultants de l'intervention de savants qui ont usé de poudres, pratiqué l'éviscération ou encore réduit le corps à son squelette. Puis l'auteur en vient [End Page 242] rapidement au cœur du sujet. Il consacre un chapitre à chacune des pratiques conservatoires inventées ou perfectionnées par des médecins ou chimistes du 19e siècle.

La première méthode présentée, peut-être la plus connue, car encore en usage chez les thanatopracteurs actuels, est celle de l'injection. Consistant en l'introduction d'un produit chimique préservant la dépouille des phénomènes putrides, cette technique révolutionne les procédés d'embaumement par la minimisation des atteintes corporelles. La technique d'injection est pratiquée et perfectionnée aux quatre coins de l'Europe : par le Néerlandais Ruysch, par les frères Hunter en Angleterre, par les Italiens Franchini et Tranchina, par les Français Sue, Gannal, Sucquet et Dupré, ainsi que par Laskowski en Suisse.

Puis Nicolas Delestre met à l'honneur des techniques à la notoriété plus confidentielle. Des compatriotes de Gannal et Tranchina tentent d'acquérir le pouvoir de Méduse. Entre les années 1830 et 1880, des savants parmi lesquels Girolamo Segato et Boitel essayent de pétrifier les tissus organiques. L'apparence de la pierre est obtenue en plongeant le corps dans diverses substances dont certains gardent jalousement la composition. L'une des particularités de cette méthode d'embaumement, à en croire l'un de ses adeptes Efisio Marini, est sa réversibilité. Une pièce anatomique pourrait être « dé-pétrifiée ».

À l'époque où d'aucuns améliorent les méthodes par injection ou par pétrification, un médecin suisse du nom de Mathias Mayor s'emploie lui à empailler des dépouilles, comme d'autres le font pour des trophées de chasse. L'objectif annoncé de ce médecin taxidermiste est de proposer un procédé d'embaumement low cost, à la portée de tout à chacun, qui parvient à se passer de ces produits chimiques si onéreux. Le précepte qui sous-tend l'anthropotaxidermie est non pas la conservation du corps dans son entièreté et dans son unicité, mais la préservation de ce qui constitue le support de l'identité d'un individu, à savoir son enveloppe extérieure, voire son seul visage. Restant invisible pour l'entourage, le corps du défunt à partir du cou ne vaut pas la peine d'être préservé aux yeux de Mayor. Sur un squelette débarrassé de ses tissus mous, le savant sculpte un corps. Puis il vient recouvrir ce pseudo-visage de la peau initialement prélevée et traitée.

Là où la taxidermie privilégie la conservation de l'enveloppe corporelle et remplace l'intérieur, la technique dite de l'anthropoplastie galvanique substitue un corps de métal au corps de chair. Cette technique, mise au point durant la dernière décennie du 19e siècle par Variot, restera cependant à l'état expérimental et ne sera jamais [End Page 243] réellement démocratisée. Le...

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