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  • Le Code de l'indigénat ou le fondement des États autocratiques en Afrique francophone by Gilbert Doho
  • Arnaud Tcheutou
Doho, Gilbert. Le Code de l'indigénat ou le fondement des États autocratiques en Afrique francophone. Paris, L'Harmattan, 2017. ISBN 9782343099453. 297 p.

"L'État francophone est, comme [l'était] l'État colonial, un 'régime de sabre,'" soutient Gilbert Doho (288). C'est en substance l'idée que défend l'auteur de l'essai intitulé Le Code de l'indigénat ou le fondement des États autocratiques en Afrique francophone. Notons que l'écrivain est universitaire, spécialiste de la littérature négro-africaine. Il a écrit de nombreux ouvrages parmi lesquels La Cicatrice. Ce roman met à nu les exactions coloniales et postcoloniales qui ont été perpétrées au Cameroun par la France et ses suppôts depuis 1916, année où l'Allemagne perdit ce territoire de l'Afrique centrale au profit de l'Angleterre et de la France, jusqu'à nos jours. C'est dire qu'en écrivant Le Code de l'indigénat, l'auteur n'en est pas à son [End Page 197] coup d'essai dans ses enquêtes sur les abus du pouvoir politique pendant et après la colonisation des pays francophones d'Afrique et dans l'intérêt qu'il leur porte. Rappelons, comme il le souligne dans l'"Avant-Texte" de La Cicatrice, qu'il a été à l'âge de quatre ans un enfant soldat engagé auprès des militants nationalistes qui luttaient pour l'indépendance du Cameroun. Plus tard, en tant que chercheur, il a parcouru les pays francophones pour collecter et étudier les textes de loi constitutifs du "code de l'indigénat" appliqué dans le pré-carré français en Afrique pendant la colonisation. Son essai est donc le résultat de ses enquêtes sur le terrain et de ses expériences vécues à la fois en tant que chercheur et acteur de l'Histoire.

Doho démontre que les anciennes colonies françaises installées en Afrique continuent d'être gouvernées selon les lois édictées dans le "code de l'indigénat." Celui-ci est le principal instrument colonial dont la métropole se servait, comme un sabre ou une matraque entre les mains d'un tyran, pour mater et réprimer les indigènes. Sa mise en œuvre, variable d'une colonie à l'autre, avait installé dans les territoires occupés un régime d'exception, voire un régime dictatorial et militaire. Les lois contenues dans le code sont des "infractions spéciales" (11). Les peuples colonisés vivaient donc en permanence sous le joug de l'"état d'exception," car les lois qui leur étaient appliquées étaient celles que les pays modernes n'adoptent que quand leur intégrité nationale est mise à mal. Les colons avaient peur des mouvements de soulèvement des indigènes. Ils avaient conscience de n'être pas les bienvenus chez ces derniers. De ce fait, il leur fallait des mesures draconiennes pour vaincre et mettre les colonisés au pas. Et l'auteur de comparer, comme a pu le faire Aimé Césaire dans son Discours sur le colonialisme, la colonisation au nazisme. Le code de l'indigénat s'inspire du Code noir, instrument anti-nègre que Louis XIV avait adopté pour réprimer sauvagement les esclaves et légiférer sur l'esclavage. À ce sujet, Doho affirme que: "Le code de l'indigénat fut une simple reprise du Code noir promulgué par le roi Soleil" (28).

Que ce soit en France ou dans ses anciennes colonies, les "infractions spéciales" continuent d'être appliquées. Pour ce qui est de l'Afrique, l'auteur précise que: "En décolonisant, Charles de Gaulle met en place, avec l'aide de Foccart, un subtil système mafieux qui perpétue la doctrine coloniale" (12). Notons que l'écrivain présente de Gaulle, premier président de la Cinquième République française, comme un "bon tyran" (39). Ce dernier aurait usé d'un subterfuge juridico-institutionnel pour pérenniser le "régime...

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