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Reviewed by:
  • Perpetual Motion: Studies in French Poetry from Surrealism to the Postmodern by Michael Sheringham
  • Jean Khalfa
Perpetual Motion: Studies in French Poetry from Surrealism to the Postmodern. By Michael Sheringham. (Selected Essays, 2.) Cambridge: Legenda, 2017. xvii + 379 pp., ill.

Ce volume contient quarante-cinq essais, publiés entre 1977 et 2014, rassemblés par Michael Sheringham peu avant son décès prématuré en 2016, sous un titre qui en annonce bien l'essence: le mouvement perpétuel. Sheringham s'y révèle un maître de l'art du compte rendu. On retrouvera ici la plupart des auteurs qui auront passionné ce formidable révélateur de la pensée poétique, d'André Breton à Pierre Alferi, en passant par Guillaume Apollinaire, Yves Bonnefoy, Jacques Réda, Michel Deguy, Pierre Reverdy, Victor Segalen, Gilles Deleuze et Félix Guattari, Philippe Jaccottet et bien d'autres. Un dictionnaire en quelque sorte de ce qui a compté dans la poésie en français d'un peu plus d'un siècle, écrit de bout en bout et quelle que soit la taille du texte (de deux à vingt-cinq pages) avec élégance, érudition et intelligence. Mais un dictionnaire dont on s'aperçoit, au fil de la lecture, qu'il est raisonné par un petit nombre de motifs récurrents comme autant de prises de position philosophiques sur la poésie. Ces motifs sont l'idée que la poésie est création dans le présent d'une expérience plutôt que narration ou représentation, que cette expérience est celle d'un sujet qui se dissout et se recrée constamment dans ce processus, et que cette dissolution n'est pas seulement affaire de temporalité mais aussi d'espace ou de territoire — d'où les belles lectures de Breton, d'Apollinaire et de Réda via Deleuze et Guattari. Nulle naÏveté ici: le discours qui trace et décrit au travers des œuvres et de leur contexte intellectuel et historique, les processus poétiques de territorialisation d'un matériau hétérogène et les lignes de fuite qu'ils rendent possible, est lui-même théorisé comme processus poétique dans nombre de remarques. Ce jugement sur les essais d'Apollinaire pourrait aussi bien s'y appliquer: 'like the poem, the journalistic column, with its bric-a-brac, becomes a space where an identity endlessly seeks its bearings amid the flotsam and jetsam of experience' (p. 262). C'est donc un refus constant de cette critique historiciste qui se rassure en distinguant nettement des époques (avant-garde, modernisme, post-modernisme etc.) làoù il n'y a que mouvements qui se chevauchent, se pénètrent et se réinterprètent, tous animés d'une même vie: 'How often, in respect of artistic styles and currents must we resist the lure of the single track' (p. 316). De ce point de vue la série d'études sur Alferi qui clôt le volume est à la fois théorie et exemple de ce que peut être une critique libre et inventive de ce mouvement perpétuel, capable de circuler entre les œuvres, d'y tracer la survie et la résurgence de l'avant-garde, qu'il s'agisse de la réécriture de la poésie comme cinéma ou comme éthologie. Dans l'admirable essai sur Le Chemin familier du poisson combatif (sur Alferi et Jakob von Uexküll), on ne pourra s'empêcher de lire les descriptions érudites d'une animalité inventant constamment son milieu de façon à pouvoir mieux en sortir, comme réflexion sur ce qu'était la critique pour Sheringham. Ce livre si riche en intuitions, détours, élucidations et remarquables traductions, se lira aussi comme l'art poétique d'un grand critique. [End Page 145]

Jean Khalfa
Trinity College, Cambridge
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