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Reviewed by:
  • Les femmes de lettres canadiennes-françaises au tournant du XXe siècle by Chantal Savoie
  • Michel Lord
Chantal Savoie, Les femmes de lettres canadiennes-françaises au tournant du XXe siècle, Montréal, Nota bene, coll. Essais critiques, 2014, 245 p.

Cet ouvrage nous fait pénétrer dans les méandres en grande partie méconnus de l'univers littéraire féminin tel qu'il s'est formé au Québec de Laure Conan à Michelle Le Normand, en gros de 1860 à 1930, l'accent étant mis surtout sur la période 1880-1920. Pour donner une idée de l'ampleur de ce corpus largement ignoré, Chantal Savoie donne en annexe la liste des quelque 80 femmes de lettres canadiennes-françaises de 1895 à 1933, suivie par une bibliograhie de leurs œuvres qui se calculent par centaines, soit plus de 300. Évidemment, la grande majorité ne sont même plus l'ombre d'un souvenir dans nos annales littéraires, mais il en est bon nombre qui se sont distinguées par la seule force de leurs carrières et de leurs écrits.

L'auteure remet en question l'idée voulant que l'arrivée des femmes en littérature date de 1920. C'est qu'elle tient compte non seulement des livres publiés par des femmes, mais de leurs écrits dans les périodiques, voulant ainsi corriger « les distorsions qu'opère inévitablement la considération des seules œuvres publiées sous forme de livre pour faire l'histoire littéraire ». Ainsi dans ses recherches, Savoie découvre que « c'est surtout l'importance de l'écriture journalistique qui frappe d'emblée : plus de la moitié des femmes pratiquent régulièrement ou occasionnellement le journalisme et signent plus particulièrement des chroniques [End Page 144] dans les quotidiens, les hebdomadaires […], les magazines […], etc. ». Comme ce phénomène journalistique apparaît à la fin du XIXe siècle, force est de constater que l'entrée des femmes dans l'univers des lettres date de bien avant 1920.

Après une longue et éloquente introduction, Savoie donne à lire quatre chapitres qui vont du général au particulier. Dans le chapitre 1, sur « Les profils et les carrières », elle brosse le tableau de « trois générations successives de femmes écrivaines. Celles qu['elle] nomme les aînées naissent avant 1880, les cadettes entre 1880 et 1899 ; alors que les benjamines voient le jour durant les premières années du nouveau siècle ».

Les plus importantes des « aînées » se font effectivement un nom dans le journalisme, Joséphine Marchand (1861-1925) fondant son propre périodique, Le coin du feu, Robertine Barry (1863-1910), écrivant sous le pseudonyme de Françoise dans La Patrie avant de fonder Le Journal de Françoise, pendant que Georgiana Bélanger (1867-1951) travaille sous le nom de Gaëtane de Montreuil à La Presse puis fonde Pour vous Mesdames, enfin Anne-Marie Gleason (1875-1943) signe du nom de Madeleine des chroniques dans La Patrie et fonde La Revue moderne.

Ce n'est qu'après avoir œuvré un certain temps dans le journalisme que ces femmes commencent à publier des livres. Rien encore pour bouleverser le panorama de la littérature canadienne-française, mais on doit noter que Gaëtane de Montreuil a acquis ses lettres de noblesse grâce à l'ouvrage que Réginald Hamel lui a consacré tardivement en 1976 : Gaëtane de Montreuil, journaliste québécoise (L'Aurore).

Dans le groupe que Savoie appelle les cadettes, et qui constitue « la première génération de femmes à s'inscrire au cours classique », trois femmes se distinguent : Blanche Lamontagne (1889-1958), poète régionaliste, Marie-Rose Turcot (1887-1977) et Marie-Antoinette Tardif (1895-1964), qui adopte de pseudonyme de Michelle Le Normand. Vue son importance, Savoie lui consacre en plus de ces pages du chapitre 1, la moitié du dernier chapitre.

Dans les rangs des « benjamines », on retrouve Françoise Gaudet-Smet (1902-1986), fondatrice de la revue Paysana, et Jovette Bernier (1900-1981), célèbre surtout pour...

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