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  • À la rencontre des régionalismes artistiques et littéraires. Le contexte québécois 1830-1960 by d'Aurélien Boivin et David Karel
  • Michel Lord
À la rencontre des régionalismes artistiques et littéraires. Le contexte québécois 1830-1960, s. la dir. d'Aurélien Boivin et David Karel, avec la coll. de Brigitte Nadeau, Québec Presses de l'Université Laval, 2014, xxiv-338 p.

Ce fort volume abondamment illustré, et pour cause, offre une vision peu commune dans l'histoire littéraire du Québec, en adjoignant à la présentation d'un corpus textuel des analyses des illustrations que des artistes ont créées pour les accompagner. Pour bien marquer l'intention, l'ouvrage s'ouvre sur la « liste des illustrations », plus d'une centaine et toutes décrites avec la minutie d'un conservateur de musée. Artistes francophones et anglophones se côtoyent dans ce monde où ils étaient nombreux à se rassembler en atelier. Les plus grands noms défilent : Joseph Légaré, Cornelius Krieghoff, Hector Berthelot, Henri Julien, Frederick Coburn, Suzor-Côté, Clarence Gagnon, Albert Ferland, Ozias Leduc, etc.

Le livre trouve son origine dans deux colloques datant de 2005 et 2007 tenus au Musée national des beaux-arts de Québec, puis aux universités de Saarbrücken et de Metz. Les deux directeurs, Aurélien Boivin et David Karel, avaient pour l'occasion réuni une équipe autour d'un projet de recherche sur « une histoire multidisciplinaire du régionalisme artistique et littéraire au Québec ». Le décès de Karel en 2007, qui a « causé un véritable traumatisme auprès de membres de l'équipe », explique que les résultats de ces recherches n'aient vu le jour qu'en 2014 et « que tous les objectifs visés n'ont pas été atteints ».

Néanmoins, ce qu'on lit demeure impressionnant. Les treize études couvrent la période qui va de la première moitié du XIXe siècle jusqu'à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, où l'on assiste à l'agonie de la pratique dite régionaliste. Je souligne dite régionaliste, car les auteurs dans leur acception du concept diffèrent de point de vue. Ainsi dans l'Introduction, les directeurs soutiennent que « [l']usage de ce terme [régionalisme] semble préférable à ceux de « "ruralisme", "terroirisme", "post-réalisme" ou encore "pseudo-réalisme" ». Pourtant, dès le premier texte, Maurice Lemire parle du « mouvement régionaliste et l'École du terroir (1900-1940) » et finit par affirmer que « régionalisme et terroirisme en viennent à se confondre ». La suite des études montre en revanche que les choses sont loin d'être simples et que le phénomène qui a sévi, sous la poussée de certains abbés, dont Camille Roy, dans nos lettres et nos arts ne tient pas que de l'idéologie de la terre et de la propagande agriculturiste. Certes, il y a cela dans ce phénomène multiforme qui s'étend sur plus d'une demi-siècle, mais certains agents de ce milieu étaient très ouverts au modernisme. Ainsi par exemple, Karel, dans son article intitulé « Régionalisme et socialité », rappelle que « le groupe des Casoars se constitue en 1913 parmi les étudiants de l'Université de Montréal dans le but de "remplacer l'ancienne École littéraire [de Montréal]" ». S'ils « changent leur fusil d'épaule et militent en faveur d'un "réveil [End Page 116] national" [c'est] sans pour autant renier leur parti pris envers l'exotisme ». Karel souligne aussi que « la Tribu des Casoars dont les membres prennent pour modèle Paul Verlaine […] adoptent des manières persifleuses rappelant de "décadentisme" symboliste de la fin du XIXe siècle ».

Il reste que le régionalisme/terroirisme s'inscrit surtout dans une idéologie conservatrice dont Aurélien Boivin et Kenneth Landry font le portrait de manière très documentée. Boivin étudie, dans « Les contes de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Un important apport au régionalisme littéraire », le ph...

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