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  • Penser et Écrire l'Afrique aujourd'hui by Alain Mabanckou
  • Gabriel Briex (bio)
Alain Mabanckou, dir. Penser et Écrire l'Afrique aujourd'hui. Seuil, 2017. 224 pages. ISBN-13 978-2021346664.

Dans sa leçon inaugurale (Lettres noires: des ténèbres à la lumière, Collège de France / Fayard, 2016) du 17 mars 2016 en tant que professeur invité au Collège de France à la chaire annuelle de Création artistique 2015–2016, Alain Mabanckou présentait dans un paragraphe liminaire ses angoisses vis-à-vis de la tâche qui l'attendait et du rôle qu'il acceptait d'endosser. En tant que premier écrivain invité à cette chaire, Mabanckou, qui se définissait alors comme « écrivain devenu professeur grâce aux États-Unis », déclarait en effet que ce n'était non pas le professeur mais bien « l'écrivain qui regarde le monde et ce siècle qui bascule dorénavant dans les bruits du présent et les bouleversements de la mondialisation », avant d'y définir sa double mission de « combattre l'obscurantisme et convoquer la diversité de la connaissance » (23–26). Alors, il faisait part de sa volonté de présenter la littérature francophone africaine et postcoloniale, les lettres noires (pour reprendre son terme), depuis sa perspective d'écrivain reconnu pour une œuvre romanesque prolifique et à succès, dont Bleu-Blanc-Rouge, Mémoires de porc-épic, et plus récemment Petit Piment. Donner la parole à l'écrivain autant qu'au critique littéraire et non littéraire, voilà aussi la décision que Mabanckou poursuivait au cours de sa chaire annuelle, pendant laquelle il invita chercheurs, historiens, critiques d'une part, et d'autre part écrivains, dramaturges, poètes, culminant sur le colloque du 2 mai 2016 « Penser et écrire l'Afrique aujourd'hui ». Fort du succès de sa leçon inaugurale, Mabanckou poursuivit ainsi sa double mission, dans le colloque en actes de cette date-là, reproduit et présenté dans cet ouvrage. Il convient de comprendre que ce « et » placé entre « penser » et « écrire » dans le titre n'implique pas nécessairement une coïncidence, ou un lien de causalité, mais plutôt une séparation thématique : ainsi l'ouvrage est fait d'une introduction de Mabanckou puis de deux parties, selon l'orientation des textes ou des intervenants. La première partie, « Penser », regroupe dix textes portants sur la position de l'Afrique dans la géopolitique mondiale autour de thèmes précis, comme l'Afrique dans les médias, dans l'Histoire et la société française, ou plus largement dans les représentations, mais aussi de l'influence et de l'intérêt de poursuivre cette œuvre de clarification et de prendre les clichés à revers, montrer que l'Afrique n'est ni la misère, ni une enclave, mais bien un regroupement culturel vaste et riche, et donc une ouverture indispensable : pour reprendre le titre de Séverine Kodjo-Grandvaux, penser l'Afrique, c'est penser le monde. La deuxième partie, « Écrire », laisse le champ libre à dix auteurs et créateurs de tous horizons, pour dresser un portrait-robot non seulement de l'état en actes des lettres noires d'Afrique et d'ailleurs (Dany Laferrière fait notamment un excellent exposé de l'histoire de la littérature haïtienne), mais aussi montrer que le champ des possibles reste ouvert – on peut penser plus précisément au texte en slam de Capitaine Alexandre qui clos l'ouvrage, ou de celui, comique et profond, de Gauz. Il s'agit, au cours de l'ouvrage, non pas de [End Page 1137] crier à l'état de crise de l'Afrique ou des lettres noires, mais plutôt de mettre en lumière ce vaste champ critique et poétique (au sens étymologique du terme) à l'aube de l'arrivée du continent sur la scène économique dans un contexte de mondialisation à flux plus tendus que jamais. Le texte a donc une nature déclarée de manifeste politique, qui vient entrer en résistance contre la pérennité des clichés figés de l'obscurantisme, dont le discours...

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