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Reviewed by:
  • Samuel Beckett and Cinema by Anthony Paraskeva
  • Claire Lozier
Samuel Beckett and Cinema. By Anthony Paraskeva. (Historicizing Modernism.) London: Bloomsbury Academic, 2017. 195 pp.

Le livre d'Anthony Paraskeva propose une étude richement documentée sur le rapport que Samuel Beckett cultiva tout au long de son œuvre, tant littéraire qu'audio-visuelle, avec le cinéma. Un des mérites du livre consiste à établir que la dimension cinématographique de l'œuvre de Beckett ne se limite pas à Film (1964), court-métrage muet aux accents modernistes avec Buster Keaton, ni aux pièces pour la télévision (Ghost Trio, 1975; … but the clouds …, 1976; Quad, 1982; Nacht und Träume, 1982), mais qu'elle est influencée de part en part par le septième art, et ce de manière tant thématique que formelle. En s'appuyant sur la correspondance de Beckett, ses textes critiques, ses cahiers de direction théâtrale, des documents d'archive, et une analyse minutieuse de ses récits et pièces de théâtre, Paraskeva dévoile les liens de parenté que l'écriture de Beckett entretient avec la production cinématographique de son époque, des années 1930 aux années 1980. Il apparaît ainsi que l'œuvre de Beckett s'élabore à l'aune des deux grandes vagues modernistes qui définirent la production cinématographique du vingtième siècle, des premières avant-gardes à celles de la Nouvelle Vague, plaçant toutes deux la réflexion sur la voix et le silence au cœur de leur travail de création. Paraskeva part de l'intérêt originel exprimé par Beckett pour le cinéma dans une lettre de 1936 à Sergei Eisenstein où il se présente comme un 'cinéaste sérieux' et demande à être admis à l'Institut national de la cinématographie de Moscou. Bien que cette requête soit demeurée sans suite, Paraskeva montre que les techniques modernistes du cinéma muet (montage associatif, superimposition, plans fixes, importance des objets, utilisation du silence, abstraction) informent l'écriture de Beckett dès ses débuts. Il explore également les échos entre l'œuvre de Beckett et les films de Keaton et de Charlie Chaplin, le formalisme russe (Dziga Vertov, Eisenstein), le surréalisme (Man Ray, Antonin Artaud, Luis Buñuel et Salvador Dalí), l'impressionnisme français (Germaine Dulac, Jean Epstein) et l'expressionisme allemand (F. W. Murnau, Fritz Lang). Un autre mérite du livre réside dans l'approche diachronique comparative permettant à Paraskeva de mettre en évidence l'articulation entre les premières avant-gardes et la seconde vague moderniste de la deuxième moitié du siècle qui [End Page 480] redécouvre le potentiel créatif du cinéma muet, des effets de voix disloquées et du silence à l'écran (Alfred Hitchcock, Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Alain Resnais, Jean-Luc Godard, Chantal Ackerman, Robert Bresson). Plutôt que d'en considérer la simple succession chronologique, Paraskeva explore la présence conjointe de ces deux esthétiques du silence dans l'œuvre de Beckett. L'étude des correspondances entre les phénomènes acousmatiques et les sons asynchrones étudiés par Michel Chion, notamment chez Hitchcock (Psycho, 1960) et Duras (India Song, 1975), et le travail sur la disjonction entre voix et corps chez Beckett est particulièrement convaincante. Malgré l'absence de conclusion, ce livre apporte un éclairage essentiel sur un aspect majeur de l'œuvre de Beckett permettant de mieux saisir la densité des rapports de l'écrivain avec son environnement culturel. Bémol pour les problèmes de mise en page en début d'ouvrage.

Claire Lozier
University of Leeds
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