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  • CFDT : l'identité en questions. Regards sur un demi-siècle (1964-2014) par Frank Georgi
  • Gerd-Rainer Horn
Frank GEORGI, CFDT : l'identité en questions. Regards sur un demi-siècle (1964-2014), Nancy, Arbre bleu éditions, 2014, 288 p.

On a ici le plaisir de lire un recueil d'articles qui synthétise une grande partie de l'œuvre d'un historien, alors que, trop souvent, ce genre de collection reste un exercice sans plus-value. La lecture de ce beau livre pourrait bien servir comme introduction à la vie du syndicalisme français des années 1950 aux années 1990. Frank Georgi sait comment nous donner une appréciation très fine de ce qui a animé le monde ouvrier dans son incarnation syndicale.

Ceux qui connaissent les livres de Frank Georgi savent bien ce qu'il a écrit autour de la question du rôle de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) dans la France d'aujourd'hui et d'hier. La CFDT est le syndicat français qui a le plus évolué ; son apport à la vie syndicale et politique de la France pourrait être vu comme une sorte de miroir des circonstances politiques et sociales de la Ve République. Fortement ouverte aux courants multiples et au pluralisme contradictoire des réalités concrètes de la France de la seconde moitié du XXe siècle, la CFDT est devenue une espèce de caméléon politique. La confédération catholique par excellence organisait sa propre sécularisation, bien sûr largement appuyée par des justifications intellectuelles provenant du catholicisme de gauche. Peu après, elle devenait la confédération la plus influencée par les vents gauchistes des années 1968. Et, à partir de la fin des années 1970, la CFDT prenait rapidement la voie d'une confédération assez modérée. Après le virage radical de Force ouvrière à la fin des années 1980 et après la fondation de SUD (Solidaires, unitaires, démocratiques), la CFDT était même la confédération la moins identifiée avec ce qui restait de l'esprit de 68 !

Prudemment, Frank Georgi refuse de demander si ces tournures successives, cette flexibilité inouïe, doivent être considérées comme un atout ou comme un défaut. La tâche d'un historien est de décrire et de comprendre ces va-et-vient. C'est exactement ce type d'analyse descriptive que l'auteur nous présente et il décrit ces évolutions avec un œil toujours attentif aux autres fédérations.

C'est la richesse des observations toujours très nuancées et fiables sur la vie de la CFDT, de la CGT et de FO qui fait de ce livre un texte éclairé à propos de la vie du syndicalisme en France, et pas seulement un texte incontournable sur la CFDT. L'absence d'observations sur les différences entre la CFDT et SUD est le seul regret. Cette lacune suggère donc qu'un sous-titre plus adéquat aurait été Regards sur un [End Page 150] demi-siècle (1947-1997) ou, peut-être mieux encore, Regards sur les recompositions du syndicalisme français (1950-1990).

La lecture de ce petit livre est chaleureusement recommandée, non seulement aux experts, mais plus encore aux novices. Comme toutes les larges organisations de masse, les syndicats français « héritent, consciemment ou non, des sédiments déposés par les générations précédentes, en dépit des bouleversements et des ruptures » (p. 271). Cette histoire abrégée du syndicalisme français ne nous donne pas seulement un regard aigu sur le passé, elle nous offre en même temps un regard sur l'histoire à venir.

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