In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Louis François et les frontières scolaires. Itinéraire pédagogique d'un inspecteur général (1904-2002) by Jean-Paul Martin et Nicolas Palluau
  • Ismaïl Ferhat
Jean-Paul MARTIN et Nicolas PALLUAU (dir.).–Louis François et les frontières scolaires. Itinéraire pédagogique d'un inspecteur général (1904-2002), Rennes, Presses universitaires de Rennes, « Histoire », 2014, 149 p.

L'étude des biographies des hauts fonctionnaires de la Ve République constitue souvent un paradoxe. En effet, ce régime a suscité l'adhésion d'une partie importante de ce milieu professionnel qui y a conquis une influence indéniable. Dans le même temps, les hauts fonctionnaires sont un sujet difficile pour les sciences sociales. La discrétion professionnelle et personnelle, le devoir de réserve et la difficulté d'accès aux dossiers administratifs sont autant d'obstacles sur le chemin des chercheurs. Les travaux restent relativement peu nombreux, hormis ceux qui concernent certaines personnalités de la haute fonction publique, comme François Bloch-Lainé ou Paul Delouvrier.

Il faut donc saluer l'ouvrage collectif dirigé par Jean-Paul Martin et Nicolas Palluau. Celui-ci est consacré à Louis François (1904-2002), personnage aux multiples facettes. Scout, professeur d'histoire-géographie, résistant et déporté, inspecteur général de l'Éducation nationale, gaulliste de gauche, il fait partie des hauts fonctionnaires marquants du système éducatif. L'ouvrage est original : il réunit des chercheurs qui ont rencontré cette figure sur des sujets forts différents–scoutisme, programmes d'histoire-géographie et éducation civique, bourses scolaires, concours de la Résistance.

Qui est Louis François ? Issu de la bourgeoisie protestante lyonnaise, il est marqué par son milieu d'origine, profondément républicain et progressiste. Dès l'âge de 13 ans, il rejoint le mouvement scout des Éclaireurs de France, qui constitue une expérience fondatrice d'éducation populaire qu'il poursuit durant une grande partie de sa vie. En 1927, il est reçu à l'agrégation d'histoire, entamant une carrière de professeur de lycée à une époque où celui-ci scolarise surtout les enfants de la bourgeoisie. Enseignant à Marseille, il se lie à Gustave Monod, protestant, mutilé de guerre, philosophe et proche de la gauche républicaine. C'est le début d'une longue proximité entre eux. Dès les années 1930, comme le montre Marie Dercourt-Terris (p. 37-46), Louis François publie dans les bulletins scouts et dans la revue L'Information pédagogique des textes en faveur d'une conception nouvelle de l'enseignement. Dans le même temps, ainsi que l'étudie Jean-Pierre Chevallier (p. 47-50), il développe des méthodes pédagogiques actives au travers de l'enseignement de la géographie, privilégiant l'expérience, l'observation et la mise en activité des élèves. Pour reprendre son expression, « ce n'est pas l'élève qui est fait pour l'enseignement, c'est l'inverse qui est vrai » (p. 61). Louis François est bien un réformateur, tant dans la théorie que dans la pratique.

Par-delà ses positions pédagogiques et éducatives, il est aussi un patriote et républicain convaincu. Dès les années 1930, il défend la Société des Nations et l'espoir de relations internationales apaisées. Il combat durant la bataille de France, [End Page 112] en mai-juin 1940, sous les ordres d'un général nouvellement nommé, Charles de Gaulle. Refusant l'Occupation et le régime de Vichy, Louis François s'engage dans le réseau de résistance « Confrérie Notre-Dame » et travaille avec Pierre Brossolette. Le 25 septembre 1942, il est arrêté, puis subit les affres des camps nazis jusqu'à la fin de la guerre en Europe. Cette expérience dramatique a marqué son action de pédagogue, ainsi que le note Denis Mazzucchetti (p. 111-124). Louis François devient le pilier du concours national de la Résistance, qui vise à la fois à favoriser l'étude de la Seconde Guerre mondiale et à maintenir les...

pdf

Share