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Reviewed by:
  • Colette Nys-Mazure ou l'attention vive by Anne Prouteau
  • Isabelle Roussel-Gillet
Prouteau, Anne, coord. Colette Nys-Mazure ou l'attention vive. Paris: Éditions Salvator, 2017. ISBN 9782706714986. 189 p.

Premier collectif consacré à la poète et romancière belge, publié avec la collaboration de Mathieu Gimenez, l'ouvrage réunit des essais critiques, des inédits de la poète, "Un jour comme un autre," "Écrire comme tisser, dé-lirer, dé-peindre" ainsi que des textes offerts par Sylvie Germain, Jean-Pierre Siméon, François Cheng, Jean Lavoué, Gilles Baudry et Françoise Lison-Leroy, inédits constituant la cinquième et dernière partie. Outre les poèmes intégraux, des citations essaimées (Cheng, Chédid, Delboe, Singer, etc) manifestent que la citation si prisée par Colette Nys-Masure contamine la pensée critique, habitée en poésie. D'emblée, on saisit la primauté des gestes de correspondances ("Je souhaite correspondre avec vous," écrit-elle) et de liaisons qui font que c'est une écrivain compagne d'écriture, Françoise Lison-Leroy, qui ouvre la première partie du recueil. Une analyse est d'ailleurs consacrée à l'écriture des seuils de Tous locataires, leur pièce de théâtre écrite à quatre mains. L'un des intérêts est donc de donner la parole à des poètes ou à deux éditeurs, dont Marc Le-boucher chez Desclée de Brouwer, dans une série croisant littérature et spiritualité qui a accueilli l'essai le plus connu de Nys-Mazure, Célébration du quotidien. Ce titre est programmatique d'une saisie de "l'existence ordinaire." Sa poésie serait écart, brèche, pour aborder la beauté et les thèmes de l'enfance, de la mort, du lien et du quotidien, non sans sensualité, voire érotisme, "poétique de la jouissance" selon Mathieu Gimenez. Nulle surprise alors de trouver Bonnard parmi ses peintres d'élection. Peinture en couverture, titre au seuil, les épitextes donnent lieu à une analyse de Marie-Claude Rousseau sur le lien avec les beaux-arts, également manifeste dans les trois livres parus chez les éditions Invenit dans la collection Ekphrasis. Myriam Watthee-Delmotte, qui analyse les soixantequinze tableaux de Célébration de la lecture, souligne combien la toile est pré-texte pour "étoffer le mystère" en imaginant affect et passé de la scène représentée. Elle relève à la fois l'absorbement et l'univers relationnel qui se dégagent de l'interprétation par le texte de ces images, ce qui caractériserait bien l'ensemble de la production de l'auteur.

Et qui a lu la poète saisira la pudeur de l'ensemble et la droiture d'une question qui ne pouvait être éludée: est-elle un auteur chrétien? Le choix de l'éditeur Salvator engage à penser les rapports de l'écrit et du spirituel, tout comme le fait de convier les plumes d'une théologienne et de contributeurs de l'Université catholique, dont une spécialiste d'art et de sacré, ou encore le vocable des analyses: prière, [End Page 226] épiphanies … Sans être mystique, la poète approche Dieu "en creux, par contours," ce qui, outre la pudeur, laisse liberté et réserve au lecteur. La théologienne se penche alors sur trois qualités: enfance, célébration (Prodiges ordinaires) et disponibilité au présent. De l'enfance, elle retient le "laisser venir" dénué d'intention, qu'on peut aussi mettre en regard avec l'attitude d'accueil de Marie, sans volonté: joie, sentiment d'être redevable, besoin de s'adresser, liberté, résistance aux séductions de la mélancolie et du "malheur," tout en répondant à la perte, comme l'écrit ailleurs Jean-Paul Michel. L'œuvre est, on le sait, au sceau de la perte de ses parents, événement qui est évoqué ici par trois fois, façon de délester la plume du trauma, de laisser la douleur en tache aveugle et de choisir l'échappée du drame, même s'il est bien au cœur de trois livres selon un mode d'expression...

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