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Reviewed by:
  • Histoire du STO by Raphaël Spina
  • Edward Ousselin
Histoire du STO. Par Raphaël Spina. (Synthèses historiques.) Paris: Perrin, 2017. 576pp.

Pendant l’Occupation, les lois du Service du travail obligatoire (STO) ont abouti au transfert de force de plus de 600 000 travailleurs civils français et étrangers vers les usines allemandes. Cette contribution involontaire à l’effort de guerre allemand était loin d’être un cas [End Page 140] isolé: plusieurs millions de civils ou prisonniers de guerre ont été obligés de travailler pour le Reich. Comme le signale Raphaël Spina, la ‘principale originalité, cependant, est que ce soit des lois françaises qui obligent les requis à partir. Et non des ordonnances nazies comme dans le reste de l’Europe occupée’ (p. 16). Spina décrit en détail les négotiations entre le régime de Vichy et les autorités d’occupation allemandes qui ont produit une nouvelle forme de collaboration économique, surtout sous l’autorité de Pierre Laval (Pétain est prudemment resté en retrait sur ce dossier, sans s’y opposer). Du côté nazi, le rôle de Fritz Sauckel, puis celui d’Albert Speer, dans cette version moderne du servage sont examinés. L’ouvrage de Spina permet de clarifier certains aspects longtemps obscurs de cette période historique: à ses débuts, le STO n’a pas suscité une vague générale de refus ou de résistance; la plupart des requis qui cherchaient à éviter le STO n’ont pas rejoint les maquis; les moyens plus fréquemment utilisés étaient de trouver un travail dans une ferme ou d’obtenir un certificat médical de complaisance. Plutôt que sur le développement de la Résistance, c’est sur l’opinion publique que le STO a eu le plus d’effets. La plupart des travailleurs civils sont partis en Allemagne entre octobre 1942 et août 1943. Ce transfert massif était ‘un traumatisme pour un peuple réputé casanier’ (p. 327). Peu de prisonniers de guerre français ont été libérés, malgré la ‘Relève’ tant proclamée par la propagande vichyste: ‘la population ne veut considérer que le flux total des départs, cinq ou six fois supérieur à celui des retours’ (p. 75). En envoyant plusieurs centaines de milliers de travailleurs en Allemagne, sans aucune véritable contrepartie, le régime de Vichy a définitivement perdu ce qui lui restait de légitimité aux yeux de l’opinion publique. Spina se penche aussi sur l’après-guerre, sur les débats qui ont longtemps duré autour du statut juridique ambigu de ‘déporté du travail’. Puisque ceux qui partaient dans le cadre du STO étaient parfois volontaires et avaient le plus souvent un contrat de travail et un salaire, devaient-ils obtenir un statut comparable à celui des prisonniers ou des déportés? Cette question n’a été réglée qu’en 2008. Spina rappelle également que le cas de Georges Marchais, secrétaire général du Parti communiste de 1972 à 1994, qui a suscité tant de polémiques, n’est qu’une ‘banale histoire’ (p. 415). Avec le recul historique, le STO apparaît comme une réussite partielle pour l’Allemagne nazie, qui a obtenu, grâce au soutien vichyste, de nombreux travailleurs, souvent qualifiés, pour ses usines. Cependant, les autorités d’occupation avaient des objectifs bien plus élevés en ce qui concerne le nombre de requis, objectifs qui n’ont pas été atteints en raison de la résistance passive et active.

Edward Ousselin
Western Washington University
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