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Reviewed by:
  • The Body or the Soul? Religion and Culture in a Quebec Parish, 1736–1901 par Frank A. Abbott
  • René Hardy
Abbott, Frank A. – The Body or the Soul? Religion and Culture in a Quebec Parish, 1736–1901. Montréal & Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2016, 356p.

Commencer la lecture de cet ouvrage par les remerciements nous livre certaines circonstances de son élaboration et les motivations de l’auteur. Il s’agit à l’origine d’une thèse de doctorat dont la gestation a duré des décennies et qui, fidèle au genre, ne néglige aucune source, aucune étude, aucune théorie qui pourrait baliser le questionnement et enrichir la problématique. De ces remerciements, en particulier de la section écrite dans un français dont on perçoit les labeurs de celui qui apprécie cette langue sans en maîtriser parfaitement les règles, il se dégage de profonds et touchants sentiments de sympathie à l’endroit de la culture traditionnelle québécoise qui lui était d’abord inconnue et une grande amitié pour ceux qui l’ont accueilli dans cette société et l’ont aidé dans la construction de cet ouvrage.

L’ouvrage débute par un commentaire de la toile de Krieghoff représentant le curé Brassard qui entre chez un paroissien et constate que le jeûne du vendredi n’est pas respecté. Que peut-on en dire ? Que le clergé n’a de cesse d’exercer une surveillance pointilleuse des comportements de ses paroissiens ? Que ceux-ci sont plutôt indépendants et que le clergé n’a pas l’influence qu’on lui attribue généralement dans l’historiographie ? L’auteur pose ainsi la question de la profondeur du contrôle social exercé par le clergé. Jusqu’à quel point les prescriptions de l’Église sont-elles respectées par cette population rurale canadienne-française que l’historiographie a aussi reconnue comme indépendante d’esprit ? Voilà en quelque sorte la question centrale qui est posée à la population de Saint-Joseph-de-Beauce, que l’auteur étudie de 1736 jusqu’en 1901, à travers ce titre énigmatique The Body or the Soul ?

Cette question de la place de l’Église et de la religion catholique dans la construction de la culture québécoise traditionnelle a fait l’objet de plusieurs études ces dernières décennies. Elles sont toutes ici citées ou commentées dans le premier chapitre, et en particulier celles qui ont alimenté le débat sur l’existence du « réveil religieux » des années 1840. L’auteur ne se prononce pas dans ce débat, mais utilise habilement les constats et avancées historiographiques pour justifier et enrichir son questionnement dans les archives de cette paroisse. Toutes les sources connues sont mises à profit : archives religieuses diverses, dont les rapports annuels des curés et la correspondance avec l’évêché ; recensements décennaux ; archives scolaires et municipales ; archives de la Cour des sessions de la paix et de la Cour supérieure ; enfin, archives de folklore et d’ethnologie de l’Université Laval, où ont été colligées de nombreuses entrevues à la recherche des croyances populaires des Beaucerons. [End Page 177]

Comme dans toutes les monographies de ce type, l’étude débute par le portrait socio-économique de Saint-Joseph de Beauce depuis la création de la seigneurie en 1736, la construction d’une chapelle l’année suivante et les premières institutions paroissiales. Les points majeurs de son évolution sont sans contredit l’arrivée du chemin de fer à la fin des années 1870, qui facilite les échanges avec la vallée du Saint-Laurent et les États-Unis et, antérieurement, en 1857, la création du district judiciaire du comté de Beauce et l’établissement de son chef-lieu dans cette paroisse. Saint-Joseph se dote alors d’un palais de justice et d’une prison. Le village connaît en conséquence une croissance exceptionnelle grâce à l’arrivée du personnel lié à l’administration de la justice et au transport ferroviaire. Constitué d’à peine une centaine d’habitants représentant...

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