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Reviewed by:
  • L'Algérie, terre de tourisme. Histoire d'un loisir colonial by Colette Zytnicki
  • Christian Chevandier
Colette ZYTNICKI. – L'Algérie, terre de tourisme. Histoire d'un loisir colonial, Paris, Vendémiaire, 2016, 271 pages. Collection « Empires ».

Le voyageur qui séjourne en Algérie au début du XXIe siècle a bien de la difficulté à trouver un guide de voyage. Ni Routard, ni Guide bleu, il lui faut se contenter de guides moins élaborés, voire trouver l'édition de 1974 du Guide Nagel. Certes, la décennie noire et peut-être aussi le poids du pétrole dans l'économie algérienne ont été pour beaucoup dans cette désaffection, alors que le tourisme fut longtemps une activité florissante pour ses voisins maghrébins et le demeure pour le Maroc. C'est l'un des attraits de cet ouvrage que de nous plonger dans l'Algérie coloniale en utilisant comme source les nombreux guides touristiques d'alors, à commencer par le célèbre Guide Joanne dont Colette Zytnicki trouve trace dans nombre de récits de voyage.

La vocation touristique de l'Algérie fut précoce avec, dès les années 1870, l'attrait exercé sur la bonne société internationale qui appréciait Alger comme centre d'hivernage. Elle se porta les décennies suivantes plus en avant dans les terres, avant que des citadins de l'autre côté de la Méditerranée ne viennent dans de nouvelles stations balnéaires, voire de sports d'hiver. Rien de spécifique à la colonie française, tant les Britanniques, grands praticiens du tourisme, avaient su mettre à profit en ce domaine leurs terres coloniales en Inde et en Égypte, et même en Afrique où ils fondèrent de grands parcs naturels – les Français créèrent leurs premiers parcs nationaux en Algérie en 1921. Les lendemains de la Grande Guerre apparurent ensuite comme pleins de promesses, en particulier celle de l'élargissement des pratiques touristiques à des groupes sociaux moins favorisés. En dépit du désintérêt des autorités publiques, ce fut le cas des habitants des trois départements algériens, musulmans compris, avant que la crise des années 1930 ne tempère ces espoirs. La période de la Seconde Guerre mondiale ne constitua pas une parenthèse dans ce développement, ne serait-ce que parce que l'intérêt manifesté pour la jeunesse a pu diffuser ces années-là, par le développement des organisations qui lui étaient destinées, le modèle d'un tourisme sportif et militant.

Après la guerre, le tourisme a continué à se développer, alors encouragé par l'administration mais aussi par l'air du temps. Le développement de la Côte d'Azur se produisait en même temps que celui de la « Californie de la France », cette colonie dont le climat, les magnifiques paysages, les sites urbains ou archéologiques – que les autorités ont tenté d'inventorier dès le début des années 1850 – avaient largement de quoi attirer le visiteur. Pendant une dizaine d'années, une véritable « fièvre touristique » s'est diffusée en Algérie, où les différents acteurs édifiaient des infrastructures et formaient du personnel spécialisé. Ce phénomène ne doit d'ailleurs pas être exagéré; le Sahara, pourtant l'une des régions les plus attractives, était encore fort mal équipé au milieu des années 1950. Les « événements », comme l'on disait alors, mirent un rapide terme à ce développement. Très vite, les Aurès et le site archéologique de Timgad se fermèrent aux visiteurs, puis l'ensemble des zones touristiques, à l'exception du Sahara. [End Page 123]

Le voyage dans les régions kabyles aux lendemains des rébellions, quand le touriste venait constater les effets des exactions et de la répression, évoque le tourisme des champs de bataille qui a fleuri outre-Atlantique après la guerre de Sécession puis dans les régions dévastées par les combats de la Grande Guerre. Il s'agit...

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