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Reviewed by:
  • Status, Power, and Identity in Early Modern France: The Rohan Family, 1550-1715 by Jonathan Dewald
  • Andreas Nijenhuis-Bescher
Jonathan Dewald Status, Power, and Identity in Early Modern France: The Rohan Family, 1550-1715 University Park, The Pennsylvania State University Press, 2015, xii- 247 p.

Jonathan Dewald propose une analyse sociale des notions de statut, de pouvoir et d'identité dans la France moderne en se fondant, paradoxalement, sur la grande noblesse, c'est-à-dire un groupe social extrêmement minoritaire, regroupant peut-être un pour cent de la population.

La lignée retenue est celle des Rohan, envisagée sur la longue durée d'un siècle et demi environ. Dans la pratique, l'époque et le personnage d'Henri II de Rohan (1579-1638) occupent une place centrale dans l'étude. Une partie entière lui est consacrée, et le prince breton est omniprésent dans les quatre autres chapitres. Or il s'agit d'un noble a priori atypique, évoluant du statut de protégé d'Henri IV à celui de rebelle à l'autorité royale à l'époque des guerres huguenotes dites de Rohan (1621-1629), voire d'exilé. Son portrait posthume, sous les traits sévères de la statue du xixe siècle qui l'incarne sur son monument funéraire genevois, orne à juste titre la couverture de l'ouvrage. Cependant, malgré la prépondérance des sources concernant le duc de Rohan, il ne s'agit pas de sa biographie ou d'une histoire événementielle de la seule France huguenote1. L'écriture, accessible et agréable, dévoile une enquête sociale permettant de saisir les stratégies déployées pour maintenir, voire élever encore, une maison nobiliaire dans un contexte de profonds changements.

Maîtrisant remarquablement les sources, J. Dewald analyse la manière dont les prétentions à l'échelle européenne des Rohan sont légitimées par un discours dynastique leur permettant de justifier auprès des pairs la position sociale et politique de la maison malgré l'adversité conjoncturelle et successorale. Ce faisant, le livre s'inscrit dans le renouvellement de l'histoire nobiliaire, impulsé par l'auteur2. Les dynamiques et les mises en réseau sont privilégiées, décloisonnant à raison l'histoire familiale, confessionnelle et «nationale» d'une famille qui se rêve et se projette à l'échelle des princes européens. Le récit change ensuite de focale pour éclairer le rôle des femmes de la lignée des Rohan dans la «gestion du capital dynastique», l'assise matérielle de la famille et les stratégies pour l'optimiser malgré les vicissitudes des temps. Un dernier chapitre étudie la clientèle et les serviteurs dans le fonctionnement interne de la maison. Après avoir dépeint la façade extérieure de la maison Rohan, J. Dewald scrute la réalité matérielle et sociale sous-jacente.

La construction de la gloire des Rohan repose beaucoup sur les femmes. En effet, entre 1525 et 1684, les épouses Rohan président de fait souvent à la destinée de la famille, les Rohan mâles décédant sensiblement plus tôt. Cette histoire «genrée» répond à une donnée propre à la noblesse d'épée: les femmes survivent longtemps à leurs maris morts au combat. C'est le cas de Pierre II de Rohan-Gié devant Pavie (1525), de René Ier de Rohan au siège de Metz (1552), de René II de Rohan pendant les guerres de Religion (1586), et de Henri II de Rohan lui-même en marge de la guerre de Trente Ans (1638). L'autonomie d'action dont elles jouissent est ici fonction de leur appartenance à l'aristocratie militaire.

Cette approche fine et intimiste a le mérite de faire ressortir la superposition des loyautés, y compris confessionnelles, et des logiques dynastiques, par exemple lorsque «le rôle dynastique l'emporte sur la maternité» (p. 105) chez Marguerite de Rohan (1617-1684), fille unique [End Page 1010] du duc. Après avoir sauvegardé le statut des Rohan et perpétué son nom au prix d'une alliance catholique avec les Chabot...

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