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Reviewed by:
  • I cognomi degli Italiani. Una storia lunga 1000 anni by Roberto Bizzocchi
  • Jean-François Chauvard
Roberto Bizzocchi I cognomi degli Italiani. Una storia lunga 1000 anni Bari, Laterza, 2014, 246 p.

De livre en livre, Roberto Bizzocchi construit une œuvre singulière dont le continuel renouvellement va de pair avec un constant souci [End Page 1005] d'approfondissement. L'exploration de l'entrelacs des affects et des intérêts d'une famille toscane a préparé l'étude de la figure du sigisbée dans l'Italie du xviiie siècle. Son ouvrage sur les généalogies fabuleuses développe une réflexion sur la fabrique de la mémoire familiale qui portait en germe le présent livre1. L'auteur y parcourt l'histoire millénaire de la formation des noms des Italiens – au nombre de 300 000 aujourd'hui – en une démonstration dense et cohérente, mais permettant aussi une lecture vagabonde des quarante-quatre chapitres. Cette vaste fresque repose sur l'appropriation d'une bibliographie innombrable, sur les résultats d'enquêtes collectives, dont certaines ont été promues par l'auteur, et sur des recherches plus personnelles sur la fixation des noms de famille dans les Marches à l'époque napoléonienne2.

À la différence des dictionnaires anthroponymiques dans lesquels prévaut une approche linguistique, l'objectif du livre est de reconstruire l'histoire de l'usage du nom de famille, de sa formation à sa stabilisation, en croisant différents facteurs explicatifs: l'identité personnelle, le rôle de l'individu dans la famille, la position de celle-ci dans la communauté, l'intervention des autorités ecclésiastiques et civiles. Cet ouvrage propose aussi une réflexion sur la restitution de la réalité onomastique dans les sources écrites. L'enregistrement des noms était tributaire de la typologie et de la fonction des documents, de la médiation du rédacteur, du passage de l'oral à l'écrit et des usages linguistes (latin/vulgaire/mixte), si bien que l'absence du nom dans un document n'impliquait pas toujours son inexistence dans la réalité. Mais cette absence en constituait un aspect significatif que l'auteur prend soin d'analyser.

Cette histoire pluriséculaire est celle du passage d'un nom unique pour désigner les individus à l'institution et à la transmission d'un nom de famille stable en plus du prénom. Si ce mouvement est incontestable dans la longue durée, il n'est ni uniforme dans l'espace, ni linéaire dans le temps. Sous l'effet du christianisme qui conduit à une simplification drastique des formes onomastiques romaines (praenomen, nomen, cognomen) et des usages germaniques de matrice indo-européenne qui donnaient à une personne un seul nom, le nom unique est la norme avant l'an mil, sauf peutêtre dans le Sud de la péninsule, sous domination byzantine, et à Venise, où l'on observe une diffusion précoce du double nom dans les familles qui ont conquis le pouvoir. Entre les xie et xiie siècles, l'essor de la double appellation dans les sources est tel qu'il ne peut être imputé à un changement purement documentaire. À cause de la croissance démographique, de la diversification des activités, de la multiplication des villages et de l'expansion des villes, le prénom chrétien, choisi dans un éventail réduit, a dû s'avérer insuffisant pour identifier les personnes. D'où l'adoption d'un nom qui trouvait son origine dans le patronyme, le toponyme, le métier ou le surnom. Mais l'auteur insiste sur le fait que la double dénomination n'était qu'une désignation onomastique possible et, surtout, qu'elle n'était pas nécessairement transmise de manière héréditaire d'une génération à l'autre. Et de donner l'exemple de Riccomanno, un notable de Monteriggioni (près de Sienne) qui, au xiie siècle, apparaît dans quinze actes en étant identifié de huit manières différentes.

La transmission d'un nom stable était fortement liée à la possession d'un pouvoir. Alors que les hommes...

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