In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Les corps meurtris. Investigations judiciaires et expertises médicolégales au XVIIIe siècle ed. by Fabrice Brandli, Michel Porret
  • Bruno Bertherat
Les corps meurtris. Investigations judiciaires et expertises médicolégales au XVIIIe siècle Fabrice Brandli et Michel Porret (dir.) Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2014, 394 p., 39$

Publié aux Presses universitaires de Rennes, l'ouvrage se présente comme une anthologie inédite de rapports d'expertises médico-légales effectuées au 18e siècle à Genève, rassemblés et présentés par Michel Porret et Fabrice Brandli avec la collaboration de deux doctorants, Flavio Borda d'Agua et Sonia Vernhes-Rappaz, et une préface du médecin légiste Patrice Mangin. Un tel ouvrage s'inscrit dans le prolongement des travaux de Michel Porret et de ses collègues de l'Université de Genève au sein de l'équipe DAMOCLES dont il est le directeur, consacrés à l'histoire de la justice et de la médecine légale à l'époque moderne, principalement au temps des Lumières, voire au-delà. En témoigne son livre Sur la scène du crime. Pratique pénale, enquête et expertises judiciaires à Genève (XVIIIe-XIXe siècle), publié en 2008 (en 2007 en italien). La ville de Genève et ses archives d'État constituent l'un des terrains d'enquête principaux. [End Page 273]

Cette anthologie est précédée d'une première partie introductive, composée de deux chapitres ; la seconde, qui constitue plus des trois quarts du livre, contient l'ensemble du corpus de sources. Le livre est pourvu d'une bibliographie complémentaire et de deux index pour les noms des personnes et pour les noms de lieux. Dans la première partie, les auteurs s'attachent à contextualiser leur corpus. Le fil rouge de la démonstration est la volonté d'inscrire l'histoire des pratiques médico-légales dans la longue durée et de montrer le rôlecharnière du 18e siècle dans la constitution de la médecine comme science organisée et auxiliaire incontournable de la justice. D'où la multiplication des références de la Renaissance à l'époque contemporaine (le 19e siècle principalement), d'Ambroise Paré à Alexandre Lacassagne.

Le premier chapitre, intitulé « Penser la médecine légale », dresse le cadre général de la montée en puissance de l'expertise et de la figure de l'expert à l'aune de son triomphe au 19e siècle (la diversification des champs de compétence, l'importance croissante de la preuve et du recours à l'expert, etc.), tout en l'inscrivant dans des continuités (la « médecine d'observation »). La référence à la médecine légale française de cette période est omniprésente. Le second, « Sur la scène médico-judiciaire », s'attache à décrire le contexte genevois. Sont évoqués d'abord les experts dominés quantitativement par les chirurgiens, devant les médecins surtout, à une époque où la dichotomie entre les deux disciplines est la règle en Occident, puis la procédure judiciaire de type inquisitoire dans lequel s'inscrit le travail de l'expert, de la levée du corps au procès, l'étude statistique du « contentieux médico-légal », marqué par la faiblesse des homicides et la hausse des suicides, mais aussi par la part croissante des expertises, et enfin la fabrique du rapport, aboutissement de cette « technique normative du corps violenté » (p. 68) qu'est la médecine légale.

Le corpus documentaire, quant à lui, est composé de 377 expertises, effectuées entre 1716 et 1792, extraites de 239 procédures criminelles conservées aux Archives d'État de la ville de Genève (PC, première série), et sélectionnées pour leur « exemplarité dans la construction des usages médico-légaux sous le régime arbitraire des délits et des peines selon le contentieux de la violence » (p. 53-54). Les documents sont généralement retranscrits dans leur orthographe et syntaxe d'origine, pr...

pdf

Share