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  • La justice des familles. Autour de la transmission des biens, des savoirs et des pouvoirs, Europe, Nouveau Monde, xii exix e siècles ed. by Anna Bellavitis and Isabelle Chabot
  • Lucien Faggion
Anna Bellavitis et Isabelle Chabot (dir.)
La justice des familles. Autour de la transmission des biens, des savoirs et des pouvoirs, Europe, Nouveau Monde, xii exixe siècles
Rome, École française de Rome, 2011, 505p.

Issu d’un projet de recherche collective inti-tulé « Familles, savoirs, reproduction sociale (époque médiévale et moderne) », cet ouvrage rend compte de la réflexion et du travail effectués lors de trois rencontres scientifiques qui avaient rassemblé une trentaine d’historiens sur le sujet de la transmission. À l’occasion de ces différents ateliers, l’intérêt avait été centré sur la rupture des équilibres familiaux et patrimoniaux, susceptible de provoquer des tensions, et sur l’intervention des instances, aussi bien publiques que privées, chargées de protéger et de contrôler les familles en litige (arbitrage, composition de nature judiciaire et infrajudiciaire). Cette approche était considérée dans la longue durée, du xiie au xixe siècle, et était de nature comparative, de l’Europe (France, Italie, Espagne, espaces scandinave et germanique) aux colonies d’outre-Atlantique (Saint-Domingue, Nouvelle-Espagne), mais aussi au niveau des espaces urbains tels que Paris, Toulouse, Leipzig, Rome, Venise et Trévise.

L’ouvrage collectif est composé d’une introduction et de vingt-trois articles, rassemblés dans deux parties qui traitent respectivement des « Héritages matériels » et des « Héritages immatériels ». Ce sont ces deux sujets complé-mentaires de la reproduction sociale qui ont été privilégiés par Anna Bellavitis et Isabelle Chabot, quoiqu’elles reconnaissent qu’une telle distinction n’est pas toujours aisée, notamment lorsqu’il s’agit de considérer une transmission effectuée d’une génération à l’autre, censée redistribuer à la fois les rôles et les pouvoirs au sein de la famille et de la fratrie (hiérarchies), souvent à l’origine de conflits intra- et interfamiliaux intenses.

La première partie est consacrée à l’héritage matériel, régi par les lois écrites et les coutumes, aux modalités de définition (juridique, législative) et de redéfinition rendues possibles par les actes de la pratique et les cours de justice, ainsi qu’au rôle assumé par chaque membre de la famille, en fonction de l’âge, du sexe et de la génération. Une interaction complexe et régulière établie entre les États et les institutions s’intègre dans les équilibres internes des familles, comme dans ceux établis entre leurs différents membres. Cette interaction continue contribue à mettre à mal l’image traditionnelle d’un État qui se serait édifié au détriment des familles et de leurs solidarités. Aussi la rupture d’un équilibre, d’une harmonie ou d’un silence peut-elle être résolue grâce à la réalisation d’accords privés, dont les sources n’ont pas toujours gardé de trace.

Le mariage reste le premier moment de la transmission des biens, que ce soit dans les systèmes coutumiers de l’Europe septentrionale (par exemple, dans la coutume parisienne) ou dans les pays de droit romain (Europe méridionale). Le mari a, dans chacun des deux systèmes, le contrôle sur les biens de sa conjointe, quoique le droit de celleci à défendre ses biens et à pouvoir les récupérer après le décès [End Page 774] de son époux soit protégé par la loi (le douaire, une somme à obtenir sur les biens du défunt mari, ou la restitution de la dot). Le lien important qui existe entre le mariage et la transmission des biens rend compte du contrôle, même partiel, effectué par les familles sur les choix matrimoniaux de leurs enfants, l’enjeu étant aussi bien matériel qu’immatériel, car c’est l’autorité du paterfamilias qui se trouve discutée.

Au mariage s’ajoute la succession qui rend perceptible le lien...

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