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  • Les Acadiennes et le marché du travail :Les revendications et les stratégies des militantes (1968-1991)
  • Nicole Lang

Introduction

LE COMITÉ DU CONSEIL PRIVÉ du gouvernement du Canada créa la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada (CRESFC) le 16 février 1967. Présidée par Florence Bayard Bird, cette commission était composée de sept personnes, dont cinq femmes1. Son mandat était de « faire enquête et rapport sur le statut des femmes au Canada, et de présenter des recommandations quant aux mesures pouvant être adoptées par le gouvernement fédéral afin d’assurer aux femmes des chances égales à celles des hommes dans toutes les sphères de la société canadienne2 ». La Commission s’engagea à mieux connaître et comprendre les opinions et les perceptions des Canadiennes et des Canadiens sur la situation de la femme au pays. Elle invita donc les organisations, les groupes et les individus à lui soumettre des mémoires et, en 1968, elle entreprit une série d’audiences publiques dans 14 villes des 10 provinces de même qu’aux Territoires du Nord-Ouest et au Yukon3.

La CRESFC tint une séance publique le 3 août 1968 à Fredericton. Quelques mois plus tôt, des Acadiennes de Moncton avaient formé un groupe d’étude pour préparer un mémoire4. Elles rédigèrent un questionnaire afin de sonder le pouls des Acadiennes. Ce questionnaire fut publié dans le quotidien provincial, L’Évangéline, et 241 personnes y répondirent. De plus, des entrevues furent organisées avec un certain nombre de femmes et d’employeurs de la région de Moncton. Les données recueillies permirent ensuite au groupe d’étude de rédiger un mémoire qui cernait [End Page 100] clairement les besoins des femmes en Acadie et de proposer une série de recommandations visant à améliorer leur situation5. Le mémoire fut présenté devant la Commission lors de la séance publique du 3 août.

L’analyse du mémoire des Acadiennes de Moncton révèle que plusieurs recommandations traitent de l’expérience des femmes sur le marché du travail ou encore des besoins de celles qui veulent accéder au marché du travail. Ces femmes revendiquent alors : le salaire égal pour le travail égal; un plus grand nombre d’emplois à temps partiel pour les femmes; la création de garderies subventionnées par l’État ainsi que des cours de formation pour le personnel des garderies; des exonérations fiscales pour les dépenses liées aux services d’aide ménagère et de garde d’enfants; un congé de maternité de six à huit semaines avec salaire complet ou partiel et indépendant du congé de maladie; des cours de recyclage pour les femmes voulant réintégrer le marché du travail; et une loi pour garantir que les aides ménagères et les domestiques aient droit au régime d’assurance-chômage et que les domestiques soient couvertes par une assurance contre les accidents6.

La présentation du mémoire devant la CRESFC est un moment clé dans l’histoire des femmes en Acadie car, pour la première fois, les Acadiennes cherchent à porter leurs préoccupations à l’attention du grand public. Ce groupe de militantes poursuit son travail après le dépôt du mémoire. Il forme un organisme en bonne et due forme connu sous le sigle LES FAM (Liberté, Égalité, Sororité, Femmes acadiennes de Moncton), en 1973. Il fut le premier groupe à se déclarer féministe en Acadie et s’attira vite le qualificatif de groupe marginal. Au cours des mois et des années qui suivent, plusieurs femmes se réunissent, forment des associations et militent activement pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des Acadiennes du Nouveau-Brunswick7.

L’objectif de la présente étude est d’analyser les revendications et les stratégies que les militantes acadiennes ont formulées durant les années 1968 à 1991 pour faciliter l’accès des Acadiennes au marché du...

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