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Reviewed by:
  • Villard de Honnecourt. Architecte du XIIIe siècle by Jean Wirth
  • Giulia Puma
Jean Wirth
Villard de Honnecourt. Architecte du XIIIe siècle
Genève, Droz, 2015, 380 p.

Avec cet ouvrage, Jean Wirth achève un projet de réhabilitation entrepris il y a plus d’une dizaine d’années. Ayant vécu durant la première moitié du XIIIe siècle, bien connu des spécialistes de l’histoire de l’architecture médiévale depuis le XIXe siècle et Eugène Viollet-le-Duc notamment, Villard de Honnecourt est l’auteur d’un carnet ou album (BNF, ms. fr. 19093) constitué d’un ensemble de trente-trois folios qui comportent principalement des dessins figuratifs destinés à la sculpture, des plans et des élévations architecturales, ainsi que des dessins d’ingénieur, assortis de légendes et de commentaires rédigés par trois mains différentes. Malgré cet intérêt, la biographie de Villard recèle toujours une épaisse part de mystère. Ses dessins constituent l’unique document qui permette de retracer son existence et son travail. Ils ont fait l’objet de jugements négatifs, et pour partie infondés, tendant à nier sa maîtrise technique pour le présenter comme un amateur, voire à remettre en question sa capacité à rédiger une partie des légendes et des commentaires qui accompagnent ses dessins, qu’il aurait dictés à un scribe professionnel parce que lui-même aurait été analphabète 1. La monographie que J. Wirth consacre à l’album propose de réviser ces jugements afin de restituer de Villard une image plus juste d’architecte, d’artiste et d’ingénieur compétent, maîtrisant le français comme le latin, témoin précieux des chantiers en cours, entre Cambrai, Laon, Reims et Chartres, mais également en Hongrie, entre la deuxième et la troisième décennie du XIIIe siècle, c’est-à-dire à l’apogée de ce que la périodisation de l’histoire de l’art qualifie de gothique classique.

J. Wirth fonde son étude sur l’analyse minutieuse et exhaustive des dessins et des légendes et commentaires qui remplissent les trentetrois folios de l’album, soigneusement reproduits à la fin de l’ouvrage, en un ensemble d’images en noir et blanc auquel le lecteur est sans cesse invité à se reporter. La qualité des reproductions, malgré le petit format de l’ouvrage, assure une excellente lisibilité, indispensable pour ces sources primaires, figurées comme écrites, dont J. Wirth extrait, à partir de transcriptions et de descriptions rigoureuses, une série de données et d’hypothèses foisonnantes, qui lui permettent d’établir une image renouvelée, affinée et complétée, de Villard et de son œuvre.

L’album est d’abord présenté dans sa matérialité et ses aspects techniques, codicologiques et philologiques. Depuis qu’Edouard Schneegans a établi en 1901 que trois mains différentes, baptisées Mr 1 (abréviation de l’allemand Meister), Mr 2 et Mr 3, ont écrit sur les pages de l’album, les chercheurs ont formulé des hypothèses incompatibles entre elles sur l’identité de ces scribes et, surtout, ont tenté d’établir si l’un d’entre eux était bien Villard. Tout en gardant la dénomination des trois maîtres anonymes, qui renvoie pour chacun à un ensemble de dessins et de légendes bien identifiés, J. Wirth montre que c’est dans le Mr 2 qu’il faut reconnaître Villard, tandis que Mr 1 et Mr 3 sont des scribes qu’il a appelés à son service à partir du moment où il a décidé de mettre de l’ordre dans ses dessins. L’album, en effet, n’en a pas toujours été un, ou du moins, n’a-t-il pas été pensé comme tel dès l’origine. Au contraire, on apprend comment, de façon progressive, il est passé du statut de portefeuille destiné à l’usage personnel de Villard à celui de projet de livre – demeuré inabouti – à visée didactique. Ce changement de destination explique que les dessins aient ét...

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