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Reviewed by:
  • De la simplicité comme mode d’emploi. Le minimalisme en littérature québécoise by Janusz Przychodzen
  • Nicolas Tremblay
Janusz Przychodzen, De la simplicité comme mode d’emploi. Le minimalisme en littérature québécoise, Québec, Presses de l’Université Laval, 2014, 186 p. 32,00$

Professeur de littérature française à l’Université York, Janusz Przychodzen offre un livre sur le minimalisme en littérature québécoise avec De la simplicité comme mode d’emploi. Divisé en cinq parties, l’essai introduit son angle méthodologique avant de proposer quatre chapitres portant sur un auteur québécois. Chaque analyse illustre un aspect différent de l’esthétique à l’étude dans le but de présenter une gamme variée du soi-disant minimalisme dans notre littérature. Voyage en Inde avec un grand détour de Louis Gauthier consiste en un roman d’aventures sans aventures dans lequel le personnage-écrivain, souvent ironique, déprécie l’écriture elle-même. La pentalogie Le poids des secrets d’Aki Shimazaki subvertit un autre genre littéraire, la fable, et représente une éthique basée sur une norme sensible—dans un sens phénoménologique—plutôt que morale pour juger les actions répréhensibles des personnages adultes, le meurtre et la tromperie. Tel que le laisse deviner le nom de l’auteure, dont les origines sont japonaises, l’œuvre emprunte à la tradition orientale, dépouillée et littéralisante, comme le haïku et le renga. Le grand classique Volkswagen blues de Jacques Poulin, lu sous l’angle d’une épopée négative (Przychodzen dit « dérisoire »), est une œuvre sans [End Page 127] transcendance. Le topos de la lumière y est récurrent, mais il dénote le monde concret, vide et ennuyant, un « continent sans ciel », raconté dans un « lexique bref », sec, typiquement américain. Enfin, dans Comment faire l’amour avec un Nègre sans se fatiguer de Dany Laferrière, les rapports intersubjectifs se réifient et le monde des choses, décrit dans un style télégraphique qui exploite la parataxe, participe tout autant, sinon principalement, de l’action racontée.

Les quatre études ont comme but d’illustrer la thèse de l’auteur voulant que l’esthétique du minimalisme soit présente dans le corpus québécois récent. Pour définir ce concept, Przychodzen s’appuie principalement sur Adorno ; dans l’introduction, Minima Moralia est cité à plusieurs reprises. Dans la foulée de cet ouvrage, Przychodzen propose qu’à la crise générale du Sens que traverse (ou a traversé) l’ère moderne, avec la fin des grandes idéologies et la « dé construction du métaphysique », une certaine parole littéraire minimaliste réponde par un nouveau langage épuré, littéral et intimiste, centré sur le « monde concret des choses », sur le détail et l’infime, le dérisoire et la fantaisie. Toujours d’après les mots—complexes—de Przychodzen, les quatre œuvres étudiées développent un aspect « existential » puisqu’elles reposent sur une logique du sensible plutôt que sur la raison aristotélicienne. Elles mènent à un recentrement de la question morale, comme chez Adorno, qui fait prendre un tournant éthique à la question de la représentation sans transcendance. De cette façon, le minimalisme québécois se distinguerait de celui plus ludique de Minuit, une école littéraire affirmée, regroupant des auteurs célébrés comme Toussaint, Gailly et Chevillard (que Przychodzen ne prend pas la peine de nommer ni encore moins de présenter), qui ont formé l’avant-garde ayant succédé à celle du Nouveau Roman.

Se présente ici le premier des nombreux problèmes dans De la simplicité comme mode d’emploi : le choix du corpus. Comparativement à celle mieux circonscrite de la France, qui se retrouve chez le même éditeur, l’école québécoise est fort dispersée. Du côté de la critique, il y a eu des tentatives de délimiter un ensemble. Citées en exemple, Marie-Pascale Huglo et Kimberley Leprik ont déjà proposé, dans...

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