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  • Roman
  • Pierre Karch

Dans le n° 153 de Lettres québécoises, André Vanasse écrit : « La surproduction du livre, commune en Occident, a pour effet d’augmenter les invendus et de pénaliser ainsi toute la chaîne du livre. Un livre qui quitte l’entrepôt du distributeur vers la librairie pour revenir trois mois plus tard à son point de départ coûte cher. Or il n’y a pas plus de cinq pour cent des livres publiés qui connaissent le succès, les autres livres stagnant au Québec ». Dans la même revue du printemps 2014, Jean-François Caron rassemble un dossier impressionnant de quatre pages dans lequel écrivains et éditeurs partagent leur inquiétude sur ce sujet que d’aucuns qualifient de crise.

boréal

« […] j’ai eu la chance […] d’être cloné par… un extraterrestre […], personnage venu de la supposée planète Xinak […], transformé […] en une copie conforme de moi-même. C’était en 1955 ». Le narrateur des Confessions d’un extraterrestre, qui prend les apparences et le nom même de Jacques Benoit, est ce personnage qui jette, sur un monde différent du sien, un regard critique et ironique comme le célèbre épistolier de Montesquieu, auteur des Lettres persanes. Tout y passe pour le plus grand bonheur du lecteur, surtout s’il a connu l’époque (1955–2015), ce qui ne devrait pas décourager des lecteurs plus jeunes qui ont beaucoup à [End Page 1] retenir de cette lecture. Ce roman, qui est de la famille des contes philosophiques qu’on écrivait au XVIIIe siècle, se lit le sourire aux lèvres car on y apprend à dire les choses de façon tellement agréable qu’on pourrait se croire dans le salon d’une grande dame où l’on se donne la permission de dire à haute voix ce que tant d’autres censurent.

Après des débuts difficiles, l’auteure de La belle bête (Institut littéraire du Québec, 1959) n’a cessé de gravir les marches de la renommée : prix Athanase-David pour l’ensemble de son œuvre, prix de l’Union latine, prix littéraire de la Fondation Prince Pierre de Monaco, prix du Gouverneur général et membre de l’Académie royale de Belgique. Aux jardins des Acacias, septième titre de Soifs annoncé d’abord comme un triptyque, prolonge la vie de nombreux personnages, chacun ayant droit à son récit, en commençant par celui de Petites Cendres qui « descendait vers la mer en courant, ce n’est pas vrai ce que l’on dit de moi, en ville, non, ce n’est pas vrai, je n’ai pas contaminé ce vieux client qui m’a battu autrefois, voilà ce qu’ils ne cessent tous de répéter, que les prostitués, les bisexuels, toujours nous, disent-ils, transmettent le fléau ». Ce qui relie chaque récit, c’est l’absence de ponctuation hormis la virgule, le tout ne formant qu’une phrase. C’est aussi la présence de Wrath (« the righteous indignation of God », Oxford Universal Dictionary), nouveau personnage qui incarne la colère de Dieu, sans doute indigné par la conduite de tant de marginaux. Si l’on n’a pas lu les six romans qui précèdent celui-ci, on aura certainement du mal à déchiffrer cette fresque qui recouvre beaucoup de choses peu connues de ceux et celles qui ne fréquentent pas ce milieu particulier, qui ne font que le frôler avec ou sans dégoût.

Pierre Breton « a travaillé pendant plus de vingt ans dans un hebdomadaire de la Beauce à titre de journaliste et de directeur de l’information ». On ne pratique pas une profession comme celle-là sans en rester marqué. Son premier roman s’appuie donc sur la réalité. Ce ne sont plus des nouvelles, mais une page de l’histoire du Québec, plus précisément celle de la Beauce au cours des années 1960. Il y est question de la situation mondiale, surtout de la guerre froide entre les États-Unis et la Russie...

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