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  • Anthropologie médicale et pensée politique by P. J. Georges Cabanis
  • Raffaele Carbone
Anthropologie médicale et pensée politique P. J. Georges Cabanis, textes réunis et présentés par Marie Gaille Paris: CNRS Éditions, 2014, 256 p., $42,95

Cet ouvrage réunit quatre textes de P. J. Georges Cabanis (1757–1808) consacrés respectivement aux hôpitaux, aux secours publics, à la législation des prisons et au supplice de la guillotine. Ces essais ont été choisis, présentés et annotés par Marie Gaille afin d’illustrer l’exigence cabanissienne de jeter un pont entre la médecine et l’espace public. Pour Cabanis, les objectifs de la médecine dépassent le cadre de la simple thérapie: celle-ci est une science qui examine la gamme complète des facteurs et des circonstances qui influent sur les états de santé et de maladie, et qui se doit de prendre en considération la dimension sociale et politique de la condition des malades.

L’un des aspects les plus intéressants du travail accompli par l’auteure réside dans son approche de l’œuvre de Cabanis: dans l’« Introduction » (9–76), elle se propose d’explorer la penséede ce médecin révolutionnaire en étudiant la relation complexe qu’il met en avant entre son anthropologie médicale et sa réflexion politique. Elle s’attache à montrer que dans son engagement politique dans l’approche de problèmes spécifiques (tels que la condition des malades dans les hôpitaux), Cabanis fait preuve d’un humanisme marqué par une étonnante actualité. Si cet auteur a été considéré par certains commentateurs comme l’un des tenants du matérialisme et de l’anti-dualisme, Gaille préfère ne pas s’embourber dans ces [End Page 571] discussions. Elle insiste plutôt sur les liens multilatéraux entre anthropologie, médecine et politique, tant ils constituent la base du projet cabanissien de « bienfaisance » publique. Faisant référence aux Rapports du physique et du moral de l’homme, elle consacre des pages importantes à l’articulation de la connaissance physique et de la connaissance morale de l’homme. L’auteure montre que chez Cabanis, l’interrogation politique fondamentale – comment constituer la société? – peut trouver une réponse grâce à une analyse physiologique de l’homme: cette étude fait voir que l’homme est doté non seulement de la faculté de sentir, mais aussi de celle de partager les affections des autres êtres sensibles, à commencer par celles de ses semblables; si bien qu’être en relation avec les autres est partie prenante de son existence. Gaille fait valoir que tout en soulignant les interactions inhérentes aux expériences humaines à la lueur du regard médical, Cabanis ne réduit pas la morale humaine à la vie organique: loin de pouvoir être expliqué uniquement par l’étude physique de l’homme, le « point de vue moral » (41) s’enracine dans la spécificité, le dynamisme et les exigences propres au corps politique. À cet égard, il fait la distinction entre les différentes conditions de ceux qui sont dans le besoin (par exemple, les pauvres valides et capables de travailler et les pauvres malades) et il fournit les détails de l’assistance, notamment pour ce qui est du soin médical (régime alimentaire, administration des remèdes, etc.). Force est alors de mettre en place des structures institutionnelles et des formes d’assistances adéquates à chaque groupe et à chaque situation. Néanmoins, cette conception de l’assistance ne vise pas à maintenir les pauvres dans une situation de dépendance et de minorité; elle « libère plutôt qu’elle asservit » (61). Et ce dans l’objectif de permettre à ceux qui sont aptes au travail de devenir des membres actifs de la société. En conclusion de son introduction, Gaille porte l’attention du lecteur sur l’actualité du « moment cabanissien »: d’une part, le médecin-philosophe promeut le « souci des autres en un sens moral et politique » et s’avère ainsi presque un précurseur des théoriciens du care; d’autre part, il adopte « une approche globale...

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