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  • Jacques Réda: à pied d’œuvre by Marie Joqueviel-Bourjea
  • Jean-François Duclos
Jacques Réda: à pied d’œuvre. Par Marie Joqueviel-Bourjea. (Poétiques et esthétiques xxexxie siècles, 21). Paris: Honoré Champion, 2015. 458pp.

Dix ans après La Dépossession heureuse (Paris: Harmattan, 2006), auquel elle emprunte, pour les prolonger, quelques leitmotive, Marie Joqueviel-Bourjea consacre au poète [End Page 463] Jacques Réda une seconde monographie. Les grands axes à partir desquels À pied d’œuvre s’articule sont traversés par la notion de rythme. Ce rythme, revendiqué comme mouvement syncopé où la marche se confond avec la danse, et qui n’aime rien tant que de surprendre par les déhanchements brutaux de ses swings, sert de principe révélateur à une œuvre riche d’une petite centaine de titres. Joqueviel-Bourjea s’attarde dans un premier temps sur la manière dont a évolué le rapport que Réda entretient avec la musique et l’écriture. Elle s’interroge sur ce qui, au-delà des limites génériques qu’on peut assigner à tel ou tel type de texte (prose ou vers), est susceptible de faire poème. C’est à ce titre que les derniers ouvrages consacrés à la physique sont délibérément absents du corpus d’étude, mais que les recueils tels Les Ruines de Paris (1977) ou Battement (2009), et surtout le poème ‘Fugue’ paru dans Démêlés (2008) sont, eux, abondamment cités. Parallèlement, l’auteur s’attache à chercher les traces de voisinages féconds pour rendre compte de la nature essentiellement rythmique du monde. Ainsi une partie non négligeable de cette étude est-elle consacrée à une mise en contact de l’œuvre de Réda avec celle de plusieurs de ses contemporains, parmi lesquels Jacques Roubaud, Yves Bonnefoy et Claude Estéban. D’autres encore, habités par ‘le boitement nostalgique du vers verlainien’ et dont ‘la cassure de l’être’ est ‘travaillée par le rien trouvant à se dire en des formes volontairement décalées’ (p. 414), sont convoqués. Un détour par la peinture de Nicolas de Staël provoque par ailleurs, et de manière convaincante, une réflexion sur la présence des murs comme révélateurs d’un ‘savoir essentiel’ et à découvrir (p. 285). La dernière partie de l’ouvrage aborde quant à elle le thème de l’espace, en se gardant bien de revenir sur l’image trop réductrice d’un Réda parisien, pour montrer la dimension européenne, et américaine si l’on prend en compte la découverte que constitua pour lui la musique de jazz, de son imaginaire. Se dessine alors les grands traits d’une ‘poétique de l’expérience sensible, que jamais ne récupère la théorie’ (p. 383) mais dont la ‘pensée englobante’ forme, pour l’œuvre entière, une matière et un principe. Malgré l’intérêt certain de cet ouvrage, un défaut en complique pourtant la lecture. Citations et analyses sont parfois reproduites à deux, trois, voire quatre moments différents, dans un écho irritant. D’autre part, des passages entiers de l’ouvrage paru en 2005 refont surface sans que le lecteur en soit alerté. Ainsi une lecture d’À pied d’œuvre se trouve-t-elle paradoxalement menacée d’être punie à force de se faire attentive. Ce défaut, de nature éditoriale, ne devrait cependant pas décourager le lecteur soucieux de découvrir une vision cohérente et novatrice de la poésie de Réda.

Jean-François Duclos
Metropolitan State University of Denver
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