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  • La terre qui pousse : l’ethnobotanique innue d’Ekuanitshitpar Daniel Clément
  • Alain Cuerrier
Daniel Clément, La terre qui pousse : l’ethnobotanique innue d’Ekuanitshit, 2 eédition, Ste-Foy : Presses de l’Université Laval, coll. Mondes autochtones, 2014, 247 pages.

Ce livre représente une deuxième impression du livre publié en 1990 par les Presses de l’Université Laval. L’auteur y apporte quelques ajouts et correctifs (deux références supplémentaires, outre les siennes, et une mise à jour de certains termes relatifs aux Innus) sans pour autant faire une refonte de la première édition. Ceux qui possèdent un exemplaire de 1990 gagneront peu à se procurer celui-ci. Pour ceux et celles qui n’ont pas eu l’occasion de se procurer la première édition, voici votre chance.

Il existe peu de documents ciblant l’ethnobotanique innue, si ce n’est le travail de Géraldine Laurendeau (2010; 2015). D’où l’intérêt de cet ouvrage. Il est dommage toutefois que l’auteur n’ait pas pris le temps de revoir les parties plus théoriques de la première version du livre à la lumière des travaux récents sur l’ethnobiologie (comme ceux de Atran 1986, Berlin 1992, Hunn & Brown 2011, Medin & Atran 1999, ou Turner 1997 pour ne nommer que ceux-ci).

Les chapitres se succèdent de la théorie à la nomenclature et l’utilisation des plantes, en passant par la méthode ethnographique utilisée par l’auteur, la vie des plantes, leur classification, les principes d’identification et d’utilisations. Le tout se termine par la liste des plantes récoltées qui ont mené à un lexique innu. La nomenclature quant aux noms latins est désuète, ce qui n’empêche toutefois personne de lier noms latins et noms innus. L’utilisation de certains termes botaniques demeure, par ailleurs, quelque peu imprécise : les lycopodes ne possèdent pas de rhizomes à proprement parlé ou, encore, les lichens, de racines. Un travail de mise à niveau, sans être obligatoire, aurait été souhaitable. Il faut toutefois rappeler qu’il ne s’agit pas ici d’un ouvrage de botanique. Le lexique innu représente une somme concise fort utile pour quiconque entreprend un travail similaire avec une nation appartenant à la famille algonquienne.

Le lecteur apprendra ainsi qu’il existe 23 lexèmes pour nommer les plantes à fruits. En tout, l’auteur déploie un lexique comprenant plus de 120 lexèmes. Par ailleurs, la classification innue d’Ekuanitshit est surtout fondée sur des critères morphologiques, donc d’ordre sensoriel, soit la taille ou le port des plantes. L’étymologie renvoie également aux relations avec les animaux. C’est ainsi que le sorbier décoratif ( Sorbus decora) se nomme Mashkuminânakashî, qui réfère à l’ours ( mashku). L’auteur pousse l’exploration plus loin en rattachant la part animée des lexèmes à des forces spirituelles ou des qualités humaines. Les arbres sont ici privilégiés : 12 lexèmes animés pour un total de 23. Par son importance et sa forme, sans doute, mais aussi et surtout, souligne Clément, sa présence dans la fabrication de la tente tremblante, l’arbre ne peut qu’être de genre animé. Certains sites ou habitats renvoient aux plantes, à leur présence. Ainsi, Shakuteu-minishtukidentifie un lieu, celui de l’île aux chicoutés. Cette dénomination semble assez courante parmi les Premières Nations et les Inuit du Québec. L’identification des plantes chez les Innus d’Ekuanitshit repose sur l’habitat où pousse la plante, mais également sur l’odeur des plantes (écorce ou tige), le goût, ainsi que des critères visuels (la forme des feuilles, la couleur des fruits). Ce sont en occurrence les mêmes critères utilisés par les botanistes.

Il faut d’abord comprendre le but que l’auteur s’est donné. Clément nous dit que le tout est « de découvrir les fondements des connaissances d’un peuple » (21). Il part du fait que la taxonomie/classification se résume à une simple manifestation de cette connaissance. Afin de...

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