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  • Signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-xvie siècle) dir. by Patrick Boucheron and Jean-Philippe Genet
  • Pierre Monnet
Patrick Boucheron et Jean-Philippe Genet (dir.) Signes, traces, empreintes du pouvoir (xiiie-xvie siècle) Paris/Rome, Publications de la Sorbonne/École française de Rome, 2013, 527 p.

L’histoire du politique telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui s’attache à bon droit non plus seulement aux institutions, aux constitutions, aux régimes et aux porteurs ou agents de la décision ou de la légitimité, mais aussi aux modes de domination, de transaction, de délibération et de négociation, aux dispositifs normatifs et aux racines culturelles, intellectuelles et religieuses du champ ou de l’objet politique, aux discours, aux images et mémoires, bref aux représentations et à leur grammaire symbolique et idéologique. C’est dans ce périmètre élargi, recomposé par un élan interdisciplinaire et comparatif, que s’est d’abord inscrit le programme de recherche consacré à la « Genèse de l’État moderne ». Sous l’égide de son directeur, Jean-Philippe Genet, et de Patrick Boucheron, un second souffle a prolongé le mouvement sous la forme d’un projet intitulé « Le pouvoir symbolique en Occident (1300-1640) », dont le présent volume est issu.

Tel un retable médiéval, trois volets composent le triptyque : les vecteurs de l’idéel, les systèmes de valeurs et une analyse comparative synchronique et diachronique des formes de l’État et de sa représentation. Si l’on s’accorde à penser que le pouvoir n’est pas seulement puissance et décision mais aussi, et peut-être avant tout, signe, alors convient-il de considérer à la fois le signe opposé à celles et ceux qu’il domine (signe « sur », si l’on veut) et le signe manifesté de sa propre légitimité (signe « de », par conséquent). Un tel vocabulaire, revendiqué d’emblée par les éditeurs du volume, place la réflexion à un double niveau : celui d’une méthode et celui d’une sémantique. Ce dont il est plus précisément question n’est rien moins que le déploiement, en un temps et dans des lieux donnés, d’une rhétorique de la puissance par un marquage, en l’occurrence sur le théâtre très particulier que forment les villes d’Occident du xiiie au xvie siècle, autrement dit au moment de l’achèvement de la grande poussée urbaine de la première modernité européenne, ou plutôt et plus sûrement de la mise en place des réseaux urbains.

La lecture du recueil fait aussitôt comprendre que le déplacement méthodologique et sémiologique recherché, et opéré, a pour conséquence immédiate, qui n’est pas mince, de modifier la définition que l’on peut et doit formuler de la ville elle-même. Il faut, en effet, pour saisir le sens et la nature d’une nouvelle rhétorique des marques urbaines du pouvoir (lequel peut-être ecclésiastique, royal, princier ou citadin lui-même), ne plus se contenter d’une caractérisation simplement démographique, économique ou monumentale de la ville, mais faire l’hypothèse d’une cité conçue comme la mise en contemporanéité, à la fois culturelle, sociale et spatiale, d’éléments construits, placés et conservés par des temporalités différentes et qu’il convient chaque fois de renommer, d’actualiser et de réaffecter, bref de remettre au présent sans anéantir le palimpseste qui leur donne sens.

Par un joli jeu d’images changeantes, dans leur support comme dans leur matérialité et leur efficacité, les vingt-deux contributions rassemblées observent le marquage, le traçage et la signature du pouvoir en ville sur le double mode d’un entassement vertical (châteaux, élévations, palais, tours, portes, arcs, etc.) et d’un étalement horizontal, l’un et l’autre reliés par les linéaments d’une déambulation et de déplacements ou mobilités également contrôlés (ne...

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