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  • Histoire du travail social
  • Axelle Brodiez-Dolino
Henri PASCAL. – Histoire du travail social en France. De la fin du XIXe siècle à nos jours, Rennes, Presses de l’EHESP, 2014, 317 pages.

Fort de 500 000 à un million de salariés en France aujourd’hui, selon les estimations, les professions prises en compte et les modes de comptabilisation des ministères, fluctuants d’une année à l’autre, le travail social fait encore l’objet de travaux historiques peu nombreux, de surcroît épars et ciblés. L’offre en termes de travaux synthétiques est étique – l’une des rares exceptions étant l’article de Françoise Blum publié dans Le Mouvement social en 2002, « Regards sur les mutations du travail social au XXe siècle »4, qui caracole depuis, chaque année, en tête des consultations des lecteurs sur les portails. Pour la première fois donc, un ouvrage large, tout à la fois synthétique et synoptique, mais ne reculant pas devant l’immersion dans les sources, approche l’histoire du travail social depuis ses racines, à la fin du XIXe siècle, jusqu’à nos jours. L’auteur, présenté de façon assez elliptique comme « sociologue et formateur dans plusieurs institutions de formation en travail social », a accumulé et digéré, au fil d’une trentaine d’années de carrière, une documentation assez considérable en termes tant de bibliographies que de sources, qu’il restitue ici sous la forme de ce qui nous semble bien plus qu’un manuel : un ouvrage de synthèse relativement exhaustif et approfondi, tout en restant parfaitement accessible et lisible pour le jeune étudiant en travail social, l’amateur intéressé et jusqu’à l’historien plus confirmé, sollicité pour produire des cours sur le sujet ou désireux de se documenter sur la question.

L’ouvrage se compose de cinq parties chronologiques, aux césures pas toujours clairement explicitées (ainsi celle de 1949) mais néanmoins parfaitement pertinentes. La « naissance du travail social » se joue entre la fin du XIXe siècle et la veille de la Grande Guerre, alors que la IIIe République inaugure une vaste législation sociale. Importées du modèle anglais des settlements, les premières « maisons sociales », qui deviendront ensuite « résidences sociales » puis « centres sociaux », se développent à Paris entre 1895 et 1908. L’action se déploie également dans les domaines du logement et de la prévention sanitaire, en particulier la lutte contre la tuberculose et la mortalité infantile, via la mise en place de dispensaires et de visites à domicile. Dans le domaine de la protection de l’enfance, le rôle moteur ne vient pas de l’initiative privée bénévole mais des pouvoirs publics, avec le développement de lois qui culminent en 1912 (instauration des tribunaux pour enfants) et mettent peu à peu à bas l’ancien édifice répressif des colonies pénitentiaires et correctionnelles, au profit d’institutions spécialisées plus éducatives de « sauvetage » et de « patronage ». L’auteur revient aussi dans ce chapitre sur les « sources idéologiques du travail social » (catholicisme social, protestantisme et solidarisme laïc incarné par le Musée social), pour aborder enfin les débuts du processus de professionnalisation (rationalisation des œuvres et interventions sociales, puis création entre 1900 et 1913 des premières écoles de service social, ancrées dans une diversité de courants idéologiques et d’approches).

Le deuxième temps, entre 1914 et 1939, est celui du « développement des interventions sanitaires et sociales », catalysé par la guerre. La mobilisation des hommes et le travail des femmes, qui conduit dès 1917 au développement, sur le [End Page 153] modèle anglais, des surintendantes d’usine, les lois sanitaires enfin votées, ainsi sur la lutte contre la tuberculose, l’engagement des femmes comme infirmières, l’apport américain de fonds et de méthodes, donnent une impulsion nouvelle au service social. Dans l’entre-deux-guerres, les échanges internationaux se multiplient, les formations pour travailleuses sociales se différencient et s’institutionnalisent avec la mise en place des diplômes d’infirmière...

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