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Reviewed by:
  • Classics in the Modern World: A « Democratic Turn »? ed. by Lorna Hardwick et Stephen Harrison
  • Anthony Andurand
Lorna Hardwick et Stephen Harrison (dir.) Classics in the Modern World: A « Democratic Turn »? Oxford, Oxford University Press, 2013, xxxvii-477 p.

L’étude de la réception de l’Antiquité, définie dans la littérature anglophone comme les classical reception studies, a connu ces dernières années un important développement, nourri par les apports des sciences sociales. Dans ce champ du savoir, caractérisé aujourd’hui par le foisonnement des objets et des questionnements autant que par la pluralité des approches, l’heure semble désormais venue, comme l’attestent plusieurs initiatives récentes1, de dresser un premier bilan.

C’est dans cette réflexion de fond sur l’évolution et les orientations actuelles de la discipline [End Page 799] que veut s’inscrire cet ouvrage collectif, fruit d’un programme de recherche international. Les contributions qu’il rassemble, dans un parcours menant de la fin du xviiie siècle jusqu’au très contemporain – ancré, pour l’essentiel, dans le domaine anglophone–, ont pour ambition d’éclairer et de discuter la question mise en exergue dans le sous-titre même de l’ouvrage. On pourrait la formuler ainsi : assiste-t-on depuis quelques décennies à un regain d’intérêt pour l’Antiquité, qui aurait pour corollaire, dans le domaine spécifique des reception studies, ceque l’on pourrait désigner comme un « tournant démocratique »?

Cette notion, dont le contenu et les implications sont analysés avec soin, est forgée sur le modèle des multiples turns qui ont affecté, depuis les années 1960, l’historiographie et les sciences sociales. Elle recouvre, dans la perspective de Lorna Hardwick et Stephen Harrison, une pluralité de phénomènes. C’est, tout d’abord, indépendamment ou à rebours de l’idée d’un déclin des humanités, le constat que le rapport à l’Antiquité, rendue accessible et disponible à un public accru grâce à la multiplication des supports, continue d’influer sur la réflexion et les débats du temps présent. C’est, ensuite, le sentiment que le « matériau grec et romain », à mesure qu’il faisait l’objet d’une plus large diffusion, a su s’inscrire progressivement, au cours des cinquante dernières années, dans un « plaidoyer pour la libération et l’émancipation, ainsi que dans la critique politique et sociale » (p. xix). De ce point de vue, suggèrent L. Hardwick et S. Harrison, « le tournant démocratique peut être envisagé comme un déplacement de l’attention, depuis l’association de l’Antiquité au groupe étroit des élites bénéficiant de l’éducation, de la richesse et du loisir nécessaires, vers un plus grand nombre d’acteurs » (p. xxii).

Ce processus de démocratisation, lié à la place et au rôle de l’Antiquité dans le monde contemporain, n’a pas été sans conséquence sur le plan des pratiques historiographiques. La notion de democratic turn a vocation à décrire – c’est le second aspect de la réflexion – des « changements épistémologiques durables » (p. xxii) dans les manières actuelles d’appréhender les modes de réception de l’Antiquité, à travers la pluralité des groupes, des pratiques et des stratégies auxquelles ils font appel. À l’œuvre depuis plusieurs années, cette évolution historiographique serait non seulement à l’origine d’un élargissement inédit de l’horizon des reception studies, fondé sur l’intégration de thématiques de recherche originales, mais elle aurait également favorisé, dans le sillage de l’esthétique de la réception et des cultural studies, l’émergence de nouvelles approches, formulées en termes d’engagement et de response, de performance et d’involvement. C’est cette conception renouvelée, plurielle et polysémique, de la réception de l’Antiquité comme phénomène culturel et comme champ de la recherche, que l’ouvrage se propose d’illustrer à travers une série d’études de cas.

Le volume réunit une trentaine de contributions, réparties dans six sections thématiques...

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