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Reviewed by:
  • Circulation des idées et des pratiques politiques. France et Italie (XIIIe-XVIe siècle) ed. by Anne Lemonde et Ilaria Taddei
  • François Otchakovsky-Laurens
Anne Lemonde et Ilaria Taddei (dir.) Circulation des idées et des pratiques politiques. France et Italie (xiiie-xvie siècle) Rome, École française de Rome, 2013, 406 p.

Prolongement d’une journée d’étude organisée en 2009 à l’École française de Rome, l’ouvrage rassemble dix-sept études consacrées à la circulation des idées et des pratiques politiques entre la France et l’Italie, du xiiie jusqu’au début du xviie siècle ; la période tardo-médiévale domine nettement, avec treize articles. L’édition est assortie d’un index des noms de personnes ainsi que de résumés synthétiques des contributions.

L’ouvrage se distingue par ses choix de composition. Anne Lemonde et Ilaria Taddei, comme elles l’annoncent en introduction, ont voulu éviter les comparaisons terme à terme entre les deux aires, afin d’accéder aux dynamiques de l’échange idéologique et de saisir les nuances et la variété des « expériences institutionnelles, juridiques, idéologiques » (p. 4). Les trois parties correspondent à l’élaboration d’un raisonnement dialectique, s’appuyant sur les mouvements de personnes et d’idées et les pratiques politiques. En combinant l’étude des comportements et des parcours liés au pouvoir à celle des constructions intellectuelles, sans réduire les premiers à l’illustration ou à la mise en application des secondes, le projet scientifique adopte un angle d’approche original sur la sphère idéelle1.

Le cheminement logique de l’ouvrage part de l’idée de la perception d’une altérité politique entre Français et Italiens, qui croît au cours des siècles étudiés. Il s’appuie sur une articulation claire et pertinente des propos des auteurs de cette série d’études dont les objets sont très divers. Ainsi la contribution d’Élisabeth Crouzet-Pavan, qui démontre la compréhension fort divergente du « paradigme vénitien » de part et d’autre des Alpes, s’élargit de l’examen croisé des interprétations de La politique d’Aristote puis de Thomas d’Aquin. Le lien se fait alors avec les auteurs qui, dans les textes suivants, mènent leurs études sur le terrain du droit : Patrick Gilli sur la réception d’Aristote, puis Guido Castelnuovo à propos de l’adaptation de Bartole de Sassoferrato dans le Songe du Vergier par Evrard de Trémaugon, à quelques décennies d’intervalle au xive siècle. Ces auteurs offrent au lecteur une très solide armature documentaire, avec des notes dont la précision et la justesse sont bien plus stimulantes qu’un simple apparat justificatif. L’interprétation est influencée par le type de pouvoir que servent les penseurs, selon que le politique est envisagé en termes de commune ou de royaume. Mais, comme le démontre magistralement P. Gilli, « le paysage [est] nettement plus sfumato » (p. 55) que ne le laisserait penser cette opposition attendue entre deux systèmes politiques. L’essentiel est en fait ailleurs. La pensée politique vaut par sa cohérence propre ; certes liée à un environnement particulier et à une situation précise, elle se nourrit et s’inspire des lectures transalpines croisées, dans un incessant et fécond mouvement de circulation intellectuelle. [End Page 764]

Abordant la première modernité au travers de l’examen de la lecture et du réemploi d’auteurs politiques italiens aussi renommés que Nicolas Machiavel ou François Guichardin dans le royaume de France, Ariane Boltanski puis Jean Balsamo excellent dans la mise en place du contexte historique propre à chaque adaptation de la pensée politique étrangère, tantôt inspiratrice, tantôt décriée. Les auteurs identifient et dépassent de nombreux topoi, en particulier autour du magnétisme de la pensée machiavélienne – aussi valable dans l’Europe renaissante que de nos jours. L’exposé de J. Balsamo parvient ainsi à retracer sous l’angle franco-italien la gestation d’une œuvre...

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