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  • Le système conceptuel de l’ordre du monde dans la pensée grecque à l’époque archaïqueby Vincent Du Sablon
  • Arnaud Macé
Vincent Du Sablon Le système conceptuel de l’ordre du monde dans la pensée grecque à l’époque archaïque. Timè, moira, kosmos, themis etdikè chez Homère et HésiodeLouvain, Peeters, 2014, 351 p.

Cet ouvrage, issu d’un travail de thèse, entreprend de décrire la représentation de l’ordre du monde telle qu’elle peut être dégagée de l’étude précise des occurrences des termes timè, moira, kosmos, themiset dikèdans les poèmes homériques, les hymnes dits homériques et les œuvres attribuées à Hésiode. Chacun de ces termes ayant reçu séparément l’attention soutenue des spécialistes, la tâche de celui qui entreprend de les regarder ensemble en est d’autant plus difficile. Vincent Du Sablon l’accomplit avec le mérite supplémentaire de prouver que ces termes font système, et que l’étude de chacun d’eux est une porte d’entrée vers un système de représentation de l’ordre des événements et des choses dont la logique doit être explorée.

La notion de timèest explicitée par la formule générale que l’on peut abstraire de ses usages, celle de « l’évaluation de la valeur de chaque être considéré à l’intérieur d’une communauté, et plus largement, dans le monde ». Elle permet de désigner aussi bien « la valeur intrinsèque d’un individu » que « les témoignages ou les gestes par lesquels cette valeur lui était reconnue par un groupe ou un de ses membres » (p. 27). Elle confère à chacun une valeur et un statut particulier, le positionne ainsi à une place relative au sein d’un groupe, et le mesure donc au sein d’une hiérarchie. Elle est pour l’auteur la marque même du social tel qu’il apparaît dans la société archaïque : ignorer les timai, comme le font les prétendants ou les cyclopes, c’est sortir d’une société possible.

Le terme kosmos, comme le note à juste titre V. Du Sablon, « n’est jamais », chez Homère, et pas davantage chez Hésiode, « utilisé dans [le] sens ‘cosmique’ » : « nul passage chez ces auteurs où le terme est appliqué à l’ensemble du monde considéré comme un Tout ordonné » (p. 62). L’auteur fixe, sous la diversité des occurrences, le schème général, celui d’une « organisation structurée de divers éléments », qui s’incarne tout particulièrement dans la construction d’un ouvrage d’art, l’apprêt d’une toilette ou le rangement des hommes sur le champ de bataille – l’auteur reconnaît l’importance de ce dernier champ pour l’application du terme et du verbe. Moiraet themissont alors introduits et une hypothèse générale est formulée, que le reste du livre aura pour tâche de mettre à l’épreuve des occurrences particulières.

La timè, expression de la valeur accordée à chacun par le groupe, serait à mettre en corrélation avec un « niveau existentiel », celui d’une part d’existence reçue par chacun (moira), afin qu’apparaisse un kosmos, qu’il ne faudra donc pas prendre comme « cosmos-monde », mais « en tant qu’ensemble structuré de relations, en tant que ‘cosmos social’ » (p. 67), c’est-à-dire en tant que structure résultant de la distribution « des portions sociales et existentielles ». Cette corrélation fonctionnerait aussi bien pour les mortels que pour les dieux, et la themis, définissant la norme du comportement approprié dans tout système défini par l’ordre précédemment décrit, serait le « ferment du système » (p. 68). L’univers tout entier, en tant que somme des rapports entre hommes, entre dieux, et entre hommes et dieux, pourrait n’être qu’un tel ordre distributif. La deuxième partie de l’ouvrage vérifie que cette structure se retrouve bien chez Homère et dans les hymnes hom...

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