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Reviewed by:
  • Jean-Pierre Vernant dedans dehors dir. by Maurice Olender et François Vitrani
  • Dan Dana
Maurice Olender et François Vitrani (dir.) Jean-Pierre Vernant dedans dehors Paris, Éd. du Seuil, 2013, 211 p. et 24 p. de pl.

Ce numéro spécial de la revue Genre humain évoque, à la fois par des textes et par des images, la figure tutélaire de Jean-Pierre Vernant (1914-2007). Il s’agit de la publication d’une journée organisée à la Maison de l’Amérique latine dans le contexte des premiers hommages rendus à la mémoire de l’illustre disparu. Le choix des futurs éditeurs a été de donner la parole aux amis, disciples et lecteurs, une vingtaine en tout, qui, par leur variété (écrivains, chercheurs, savants, poètes, témoins de la Résistance), rendent compte des multiples engagements de J.-P. Vernant, ainsi que des voies qu’il a tracées. L’intérêt pour son œuvre ainsi que pour son parcours (savant, résistant, militant, intellectuel engagé), qui avait dernièrement incité nombre de ses disciples à l’entraîner sur le terrain délicat de l’autobiographie1, a été renforcé depuis sa disparition : J.-P. Vernant est aujourd’hui encore plus présent dans l’espace public français.

Au fil des pages se mélangent des souvenirs, des influences, de l’émotion, de la lucidité; il arrive souvent que des contributeurs différents citent les mêmes passages, ou évoquent en des termes identiques la pensée, la parole, l’écriture de J.-P. Vernant ou ses qualités humaines, notamment la simplicité et la clarté. On est souvent projetés dans son intimité de résistant, de militant, de savant, d’ami, dans celle de sa famille enfin.

L’introduction de Maurice Olender, intitulée « Dedans dehors », reprend une formule de J.-P. Vernant qui renvoie aux ruptures et aux fidélités, aux rapports entre mythe et politique, entre travail scientifique et vie de militant, bref, à sa relation critique avec la mémoire, lui ayant permis un double engagement, contrasté et solidaire. J.-P. Vernant « avait choisi de ne pas séparer les itinéraires du citoyen et du savant sans pour autant les confondre », car, malgré l’engagement passionné du militant, il s’attachait à l’« objectivité distante du savant » (p. 11).

Quelques textes se penchent sur son engagement dans la Résistance, dont celui de Laurent Douzou qui propose de le contextualiser en abordant « les silences d’un résistant », ou sur son adhésion au communisme, avec son refus constant du dogmatisme et sa vigilance antifasciste (Pierre Pachet). Se dégage ainsi un véritable « modèle Vernant », celui des « engagements résistants » et du type même du « philosophe combattant » (Vincent Duclert, p. 65), associant responsabilité et courage, ce qui lui permit d’« être le grain de sable » (Edwy Plenel, p. 151).

Les commentateurs n’ont pas manqué de remarquer à propos de J.-P. Vernant une tension entre une vie consacrée à l’étude du monde grec et la critique du « miracle grec ». [End Page 510] Nombreuses sont les contributions sur la place de la Grèce ancienne dans l’œuvre qu’il a léguée : entre autres, Umberto Todini étudie les effets de la « décolonisation » culturelle sur l’étude de l’Antiquité et Jacqueline Risset revient sur « Vernant conteur d’Ulysse ». Dans « La cité grecque et les ‘sombres temps’2 », François Hartog insiste sur la capacité de J.-P. Vernant à travailler sur la distance historique, d’où découle l’importance, dans ses écrits, de la question du passage comme « mutation décisive » (p. 179). Il lui était tout aussi nécessaire de marquer l’altérité des Grecs, puisque les mettre à distance représentait le moyen de les rendre audibles une nouvelle fois, avec un « nouveau départ » de la cité grecque (p. 181). Son structuralisme, à l’époque véritable mode intellectuelle lancée par Claude Lévi-Strauss, est enrichi d’une dimension historique, en raison de l’apport décisif de Louis Gernet (linguistique et sociologie) et d’Ignace Meyerson (psychologie historique). Car son projet de d...

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