In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Acadie 1972. Naissance de la modernité acadienne by David Lonergan
  • Chantal Richar
David Lonergan, Acadie 1972. Naissance de la modernité acadienne, Sudbury, Prise de parole, coll. Essai, 2013, 155 p., 19,95$

Dans ce volume, David Lonergan rassemble sous forme d’essai des réflexions portant sur une époque décisive pour sa patrie d’adoption, l’Acadie. L’ironie d’avoir ouvert son livre, publié chez Prise de parole, sur le rôle catalyseur de la fondation des Éditions d’Acadie par des professeurs de l’Université de Moncton serait sidérante si l’état languissant de l’édition en Acadie n’était pas déjà chose connue. Certes, les éditions Perce-Neige à Moncton remplissent un rôle indispensable en publiant des œuvres littéraires et l’on me pardonnera de suggérer ici que sa nouvelle collection Archipel-APLAQA devrait faire l’objet d’une expansion importante. Il reste que du côté de l’édition de textes analytiques ou « savants », force est de constater que le gouffre s’agrandit – gouffre que l’Institut d’études acadiennes tente également de combler de son côté, mais qui nuit à l’évolution d’un réel discours critique en Acadie. Car l’Acadie du XXIe siècle a bel et bien ses créateurs dans tous les domaines, mais ceux-ci manquent d’encadrement, d’appui et d’outils de promotion. Si la maison d’édition de l’Ontario, où « même la neige n’[a] plus le goût [End Page 514] de la mer » (Ronald Després, cité dans Lonergan), est devenue un deuxième chez soi pour une quantité croissante d’auteures et d’auteurs acadiens, il y a lieu de se questionner sur l’état de santé de l’institution littéraire en Acadie.

Cela dit, le contenu du livre de David Lonergan, s’il est parfois inégal (deux chapitres sur cinq sont consacrés à Antonine Maillet), interpelle par son habileté à rappeler la quantité phénoménale d’événements d’importance culturelle, littéraire, artistique ou sociale qui ont eu lieu au cours de l’année 1972. Une mise au point, quarante ans plus tard, se révèle fort judicieuse pour un peuple qui continue de s’interroger sur son avenir (voir à ce sujet le discours d’Herménégilde Chiasson au Congrès Mondial Acadien à Edmundston, automne 2014, http://www.prisedeparole.ca/2014/08/14/texte-de-la-conference-dhermenegilde-chiasson-au-congresmondial-acadien/). Par ailleurs, l’auteur, fidèle observateur du monde culturel acadien centré sur Moncton depuis deux décennies, prend soin de fournir des éléments contextuels précieux concernant les événements et acteurs à leur origine, ce qui permet même au lecteur non initié d’en saisir toute la portée et les enjeux.

L’adjectif « modernité », pour sa part, pourrait être défini ici comme une réaction contre une culture traditionnelle en Acadie vue comme étant vieillotte, voire opprimante. Rien de plus naturel pour une nouvelle génération d’écrivains, de musiciens, de cinéastes et d’artistes que ce rejet de ce qui est venu avant. Toutefois, la séparation n’est pas toujours clairement démarquée et les chansons de Calixte Duguay qui se sent « obligé de [s]e rabattre sur le folklore pour parler de [s]on pays » (cité dans Lonergan) se réconcilient difficilement avec le Scalpel ininterrompu de Ronald Després. De même, La Sagouine d’Antonine Maillet qui connaît un succès phénoménal à Montréal en 1972 est loin du projet de L’antilivre, sorte de livre-objet des éditions de l’Étoile magannée à laquelle collaborent Herménégilde Chiasson, Gilles Savoie et Jacques Savoie la même année. De là, la difficulté de définir ce grouillement pourtant indéniable qui semble provenir d’un peu partout en même temps.

Car sur le plan social aussi, une révolution se prépare, tout autant à l’Université de Moncton où les étudiants font la grève et contestent la vision anti-bilinguisme des dirigeants de la ville, qu’au Québec où la Crise d’octobre 1970...

pdf

Share