Combats libéraux au tournant du XXe siècle by Yvan Lamonde (review)

Book Reviews 159 Combats liberaux au toumant du xxe siecle. YVAN LAMONDE, dir. Montreal : Editions Fides 1995· Pp. 288. $29,95 Ce livre contient les actes d'un colloque tenu a l'Universite McGill, portant sur «Le liberalisme au Quebec du discours de Laurier (1877) a la Crise de 1929 ». 11 s'agit de reexaminer le constat de deces qui, depuis Les Rouges de Jean-Paul Bernard en 1971, etablit le declin; puis la disparition du liberalisme radical acompter de 1877, avec l'assagissement simultane des liberaux et des ultramontains. La douzaine d'a:uteurs figurant au sommaire de Combats liberaux reconnaissent que la fraction dominante du Parti liberal, tant aOttawa qu'a Quebec, met un bemol a·son radicalisme durant les dernieres decennie.s du xrxe siecle, davantage encore · apres sa conquete du pouvoir, en 1896 et 1897 respectivement. Et, pour reprendre l'heureuse expression d'Yvan Lamonde, «les ultramontains ultramontes avaient ete mis au pas» (14), affaiblis par une quasi-repudiation vaticane (mission Conroy, encyclique de 1892 sur le Ralliement) et par l'ceuvre du temps (deces de Mgr Lafleche en 1898 et de Jules-Paul Tardivel en 1905). Toutefois, il ne s'ensuit pas l'«unanimite ideologique» decrite par Bernard. Bien au contraire: le camp radical ajoute dorenavant ases cibles l'elite liberale ramollie, et les changements economiques et sociaux du tournant du siecle lui font vider son carquois dans de nouvelles directions. Le regime confederatif, contre lequel bataillaient les Rouges, s'est etabli durablement. L'annexionnisme est mort. L'anticlericalisme strident· perd des adeptes, avec la nouvelle neutralite des deres aux elections. Mais les idees des liberaux radicaux en matiere scolaire et culturelle ne peuvent que prolonger la confrontation avec l'Eglise. C'est sa chasse gardee que l'on pietine en reclamant }'instruction publique obligatoire, l'uniformite des manuels et de la formation des maitres, la scolarisation des femmes et des adultes, un curriculum favorisant les carrieres scientifiques ou administratives, la creation de bibliotheques publiques, et la fin de la censure.ecclesiastique des livres, journaux et eeuvres d'art. Ce sont les autorites gouvernementales que l'on aiguillonne, de maniere encore timide, en pr6nant un certain interventionnis. me a l'egard des trusts et du capitalisme monopolistique. Les parcours individuels ou institutionnels de nombre de ces radicaux sont ici retraces, avec leurs intersections: celui d'Arthur Buies, materialiste devenu deiste, mais reste anticonformiste et anticlerical (Francis Parmentier); du jesuitophobe Aristide Filiatreault et son libelle Ruines clericales (Christine Gariepy); de Laurent-Olivier David (Pierre Hebert); des deux loges quebecoises du Grand Orient de France (Roger 160 The Canadian Historical Review Le Moine); de l'avant-garde litteraire (Annette- Hayward); et de Godfroy Langlois, redacteur aLa Patrie puis directeur du Canada (Patrice Dutil). Cette aile avancee n'est guere prisee de l'establishment liberal au sein des assemblees parlementaires OU des etats-majors partisans; c'est done par des brochures, des pamphlets et surtout une presse quotidienne et hebdomadaire abondante, de meme que par des clubs politiques et des loges mac;:onniques que ces francs-tireurs font valoir leurs arguments. Le moindre merite de ce recueil n'est pas de se pencher egalement sur la tendance majoritaire du liberalisme de l'apres-1877: pragmatisme de Laurier (Real Belanger), innocuite du liberalisme a Trois-Rivieres (Rene Verrette), caractere fort peu progressiste des juges d'allegeance liberale (Sylvio Normand), politique scolaire habile des liberaux a Quebec, menageant la chevre clericale et le chou radical (Ruby Heap), radicalisme en trompe-l'reil de l'hebdomadaire L'Autorite (Fernande Roy). Ces textes marquent la borne entre moderes et radicaux. Lamonde a raison d'ecrire, en conclusion, qu'il y a toujours un besoin pour une etude approfondie de ce liberalisme consensuel qui, s'il s'en approche, ne se confond quand meme pas avec le conservatisme d'alors. Combats liberaux ne peut pretendre, par sa facture collective, al'exhaustivite OU ala synthese. Il demeure qu'il n'y a pas de hiatus quant a la qualite des etudes ou au choix des sujets abordes, ce qui le distingue de tant d'actes de colloques. Ce volume bien fait sera precieux pour les chercheurs. Une tres commode « Chronologie du liberalisme (1877-1929...