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Reviewed by:
  • Le Rouge aux joues: Virginités, interdits sexuels et rapport de genre au Maghreb by Isabelle Charpentier,
  • Alexandra Gueydan-Turek
Charpentier, Isabelle. Le Rouge aux joues: Virginités, interdits sexuels et rapport de genre au Maghreb. Saint-Étienne: Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2013. isbn 9782862726304. 334p.

La sociologue Isabelle Charpentier nous invite à redécouvrir des œuvres romanesques et des témoignages d’écrivaines (franco-)algériennes et (franco-)marocaines dans une perspective transdisciplinaire empruntant à la sociologie de la littérature et aux pratiques du genre. S’interrogeant sur la thématique de la virginité et les stratégies de prise de parole des écrivaines qui abordent ce sujet, Charpentier a pour finalité de saisir la “diversité des positions [. . .] et des pratiques d’écriture” telles que celles-ci reflètent et affectent les pratiques sociales en Algérie et au Maroc (54).

Après avoir établi, dans le premier chapitre, que l’éthique sexuelle restrictive qui pèse sur les deux sexes est imposée de façon éminemment variable selon le genre de la personne, l’étude se concentre sur la résurgence de ce thème dans les récits d’écrivaines. Le deuxième volet se concentre sur la manière dont ce thème s’inscrit au cœur du système de valeurs et des échanges des communautés arabo-musulmanes. La troisième partie examine plus spécifiquement les récits qui évoquent les violences sexuelles dont les femmes ont été victimes pendant la décennie noire en Algérie. Le chapitre suivant se focalise sur les récits subversifs qui témoignent de la réalité sociale de la sexualité prénuptiale chez les jeunes femmes. Enfin, le dernier volet étudie de façon très intelligente les projets d’écriture des auteurs qui ont servi à illustrer les chapitres précédents: il s’agit de s’interroger sur les modalités d’écriture et les finalités des différentes stratégies littéraires déployées par les écrivaines, selon le contexte de réception. En effet, comme le souligne Charpentier, si les œuvres littéraires se veulent parfois œuvres subversives à travers une mise en scène de l’intime, de la (discipline de la) sexualité et du corps, elles ne parviennent pas toujours à remplir cet objectif: ces œuvres ont tendance à osciller entre résistances (souhaitées) et reproduction (avérée) des stéréotypes (195).

Le corpus très large est constitué de près d’une centaine d’œuvres littéraires d’écrivaines diversement connues et publiées en France à compte d’éditeur, [End Page 224] et en Algérie à compte d’auteur ou en autoédition. Du fait de l’hétérogénéité constitutive de ses sources et de l’absence de questionnement sur la valeur esthétique des œuvres à l’étude, cet ouvrage offre une vue d’ensemble inédite sur les écrivaines dans le milieu de l’édition franco-algérienne et franco-marocaine, et permet d’éclairer des textes jusqu’alors largement ignorés par la critique universitaire. On retrouve ainsi des références aux œuvres de Najia Abeer, Taos Amrouche, Maïssa Bey, Nina Bouraoui, Hawa Djabali, Assia Djebar, Houria Kadra-Hadjadji, Whahiba Khiari, Aïcha Lemsine, Fadela M’Rabet, Leïla Marouane, Badra Moutassem-Mimouni, Leïla Sebbar, Khalida Toumi, Afsa Zinaï Koudil, pour les auteures algériennes, et Jamila Abid Ismaël, Souad Bahéchar, Anissa Bellefiqh, Siham Benchekroun, Sanaa El Aji, Souad El Alaoui Ben Hachem, Touria Hadraoui, Halima Hamdane, Nedjma, Sbaï Noufissa, ainsi que Bahaa Trabelsi, pour les auteures marocaines.

À noter, la bibliographie particulièrement bien documentée de cette étude qui regroupe des ouvrages de référence dans les domaines de la théorie littéraire, de l’anthropologie du corps, des théories de l’édition et de la réception, de l’étude de l’espace littéraire franco-maghrébin, ainsi que sur l’histoire, la sociologie et la place de la religion en Algérie et au Maroc. Les première et deuxième sections théoriques dévolues au domaine de l’anthropologie et de...

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