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Reviewed by:
  • Atheism, Religion and Enlightenment in Pre-Revolutionary Europe by Mark Curran
  • Émilie Gourdon
Mark Curran Atheism, Religion and Enlightenment in Pre-Revolutionary Europe Woodbridge/Rochester, Boydell Press, 2012, VIII-218 p.

Si le titre de l’ouvrage de Mark Curran résonne comme la promesse d’une somme sur l’athéisme et la religion dans l’Europe des Lumières, il faut, pour mieux le saisir, lui rendre ses justes dimensions. D’une thèse de doctorat sur la réception des œuvres du baron d’Holbach au XVIIIe siècle, l’intérêt de l’auteur s’est finalement vite porté sur les réponses conservatrices et chrétiennes qu’elles ont suscitées. Celles-ci deviennent, au fil des huit chapitres du livre, le cœur de l’enquête. M. Curran y insiste sur l’importance de l’Église gallicane, d’une presse conservatrice, de penseurs chrétiens dont les textes apologétiques s’appuient sur la raison davantage que sur la révélation. Refusant de définir les Lumières comme un mouvement unifié, l’auteur s’inscrit dans une perspective sociale et culturelle sans renier tout à fait l’histoire intellectuelle. La thèse principale du livre vise à démontrer que les adversaires chrétiens du baron d’Holbach participaient tout autant des Lumières que son matérialisme radical, qu’ils combattaient. L’auteur s’inscrit ainsi dans la lignée des travaux de Didier Masseau, Olivier Ferret et Darrin McMahon, auxquels il reproche cependant l’emploi des termes « contre-philosophophes » et « anti-philosophes », et insiste sur la dynamique des controverses, qui implique un espace commun de débat.

L’interrogation initiale de M. Curran vient de ce paradoxe soulevé par la lecture des travaux de Robert Darnton : pourquoi d’Holbach est-il si peu étudié malgré l’importance de ses ouvrages au XVIIIe siècle? Reprenant le corpus de R. Darnton et son travail sur les archives de la Société typographique de Neuchâtel (Stn), l’auteur s’intéresse aux 28 219 ouvrages interdits commandés à la Stn par les libraires français durant trente ans, jusqu’en 1789. Dans la perspective de défricher et d’ouvrir les archives de la Stn, il a construit avec Simon Burrows et d’autres collègues une base de données, The French Book Trade in Enlightenment Europe 1769-17941. Ajoutant à cela l’étude des réactions, dans la presse, à ces écrits, M. Curran en arrive très vite à une seconde interrogation: pourquoi les Lumières chrétiennes sont-elles encore moins étudiées que d’Holbach? Il concentre son attention sur le best-seller de d’Holbach, Le système de la nature, paru clandestinement en 1770 et qui entraîna une succession de réfutations. Voltaire et Frédéric II de Prusse s’y sont attelés, le Parlement et l’Église ont commandité des réponses au texte. C’est là tout l’intérêt de cet ouvrage : nous révéler, à travers la multiplicité et la diversité des réponses, tous les médias utilisés pour atteindre le public le plus large possible, remettant en cause au passage des idées reçues sur l’état de déchristianisation avancée de la sphère publique au XVIIIe siècle. Ainsi, la notoriété de Voltaire et Frédéric II n’empêche pas de constater que les réactions furent rares du côté des philosophes, quand, au contraire, les réponses chrétiennes furent plus nombreuses et innovantes qu’on ne le croit généralement. M. Curran analyse les différentes réactions à l’ouvrage de d’Holbach, chapitre par chapitre, afin de mieux saisir leur efficacité: les livres et pamphlets, les périodiques, les philosophes, les institutions et les répliques chrétiennes. Il nous amène à nous intéresser, à partir d’une étude sur la réception des œuvres de d’Holbach, à ceux qui l’ont [End Page 1079] combattu, qui apparaissent finalement dans tous les chapitres de son ouvrage et pas seulement dans des réfutations attendues.

Si...

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