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Reviewed by:
  • Christians and their Many Identities in Late Antiquity: North Africa, 250-400 CE by Éric Rebillard, and: Muscae moriturae donatistae circumvolant : la costruzione di identità « plurali » nel cristianesimo dell’Africa romana by Alessandro Rossi
  • Eliana Magnani
Éric Rebillard Christians and their Many Identities in Late Antiquity: North Africa, 250-400 CE Ithaca, Cornell University Press, 2012, IX-134 p.
Alessandro Rossi Muscae moriturae donatistae circumvolant : la costruzione di identità « plurali » nel cristianesimo dell’Africa romana Milan, Ledizioni, 2013, 426 p.

Ces deux ouvrages semblent à première vue traiter du même sujet : la construction des [End Page 1003] identités dans les provinces romaines de l’Afrique de l’Antiquité tardive. La césure chronologique diffère légèrement : en se concentrant sur le donatisme, Alessandro Rossi étudie le IVe et le début du Ve siècle, les longues décennies au cours desquelles les chrétiens d’Afrique se sont définis, entre autres, par leur appartenance au « parti de Donat » ou au « parti de Cécilien », avant que la victoire difficile de ce dernier, particulièrement grâce à l’œuvre d’Augustin d’Hippone, permette de définir un « schisme donatiste » opposé à une Église universelle (c’est-à-dire catholique). Le livre d’Éric Rebillard embrasse une période plus longue, qui cueille le christianisme africain au moment où l’œuvre de Tertullien fournit une source assez abondante pour en apprécier les caractéristiques et qui s’achève, elle aussi, avant que l’invasion vandale reconfigure les conditions de vie des Romains d’Afrique (180-430).

On s’aperçoit pourtant très vite que ces deux livres s’inscrivent dans des projets historiographiques profondément différents. Les « identités plurielles » d’A. Rossi ont peu à voir avec les « many identities » d’É. Rebillard. Dans le premier cas, il s’agit de contextualiser audelà du cadre religieux les acteurs de ce que les historiens appellent « la crise donatiste ». Pendant plus d’un siècle, depuis le début du règne de Constantin en 312 jusqu’à l’invasion vandale en 429, au moins, les chrétiens d’Afrique se sont divisés en fonction de leur appartenance au « parti de Donat » ou au « parti de Cécilien ». Les premiers se réclamaient d’une fidélité stricte aux martyrs des dernières persécutions impériales et rejetaient ceux qui, à leurs yeux, avaient été compromis par l’apostasie ou l’usage de ruses plus ou moins subtiles pour échapper à la mort. Les seconds, tout en contestant les accusations (Cécilien avait été élu évêque de Carthage en 311 et consacré par des évêques dont un était accusé - entre autres par l’évêque Donat - d’avoir livré des textes sacrés au pouvoir impérial), mettaient l’accent sur la légitimité que leur donna rapidement leur communion avec les Églises transmarines, en particulier celle de Rome, insistant ainsi sur leur catholicité.

Ce « schisme donatiste », combattu avec vigueur par Augustin d’Hippone, est l’un des dossiers historiographiques les plus imposants et les plus complexes de l’histoire de l’Antiquité tardive. Le premier chapitre passe en revue les positions successives des historiens, depuis celles clairement tranchées du catholicisme romain de la Contre-Réforme jusqu’aux analyses contemporaines très nuancées d’Yves Modéran, en passant par les thèses qui, de William Frend à Marcel Bénabou, voyaient dans les tensions entre donatistes et céciliens l’expression d’une « résistance africaine à la romanisation ». Les trois chapitres suivants confirment que le livre reste une histoire ecclésiastique : le premier est consacré aux origines de la dissension, le deuxième propose une analyse originale d’une ecclésiologie donatiste reconstruite à partir de quelques textes rares, le dernier reprend l’étude du mouvement des circoncellions, connus par nos sources pour être accusés de violences extrêmes contre leurs adversaires et contre eux-mêmes, et sur lesquels la bibliographie est presque infinie.

Avec les identités multiples auxquelles renvoie le sous-titre du livre, A. Rossi propose une perspective alternative à une supposée « identité africaine ». Celle-ci pourrait contribuer de manière intéressante au...

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