In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • La Fluidité des heures by Michel A. Thérien
  • Lélia Young
Thérien, Michel A. La Fluidité des heures. Ottawa: Les Éditions David, 2013. isbn 9782895973690. 86 p.

Ce recueil de Michel Thérien contient sept sections. Dans la première qui porte le titre du recueil, “La fluidité des heures,” le poète mesure sa propre humanité face aux sentiments les plus difficiles qui accablent l’être humain, ceux de la maladie, de la souffrance, de la perte par la distanciation et finalement de la mort de l’autre, de l’être qui sut amener une différence et métamorphoser la vie. L’épigraphe en exergue du recueil reprend une citation d’Albert Camus (Noces, 1939): “Je comprends ici ce qu’on appelle gloire: le droit d’aimer sans mesure.”

1. La rupture

Dans cette première partie du recueil, “La fluidité des heures,” (sept pages), une tristesse profonde est rendue par la métaphore de l’horizon marié à la froideur solitaire des vents d’hiver qui font le vide. La solitude ne présente aucun espoir pour l’être qui la porte jusqu’à nous. Un ton sombre et lugubre marquant la perte ouvre cette première partie du recueil. Cette section du livre est une lettre, un poème en prose dialogué–tout se passe entre le “je” et le “tu.” La mémoire ramène un soupçon du visible qui devient “peau neuve.” La marche efface graduellement [End Page 230] les traces de ce qui fut. Le corps se transforme, devient transparent et sa lumière se tamise.

Michel Thérien décrit avec beaucoup de sensibilité la disparition de la présence, cette énergie palpable qui se retire.

Le feu de l’écriture est “craché” par le regard. Métaphore de l’inouï, il côtoie de près celle de l’éclair qui représente la mort. Les portails de l’indicible tant craint par le vivant sont grand ouverts. Ainsi, les pages du recueil deviennent “ton poème” qui “se mue sur des murs dans le grondement parsemé des villes et des baraques […]. À la lisière de la nuit, j’arrive de fièvre et de misère à désamorcer l’obus sous tes pieds” (19–20). La force du rêve épargne, ici, l’être aimé de la destruction. Les images sont très fortes et font allusion à un monde de violence. L’image de l’eau devient la métaphore du véhicule qui emporte vers la mort éloignant le corps de la terre ferme: “Lentement tu t’éloignes du rivage” (20). Le départ est trop précoce. Des forces diamétralement opposées se sont affrontées. Les attentes ont été déchirées rendant plus vulnérable. “Tu dis que tes épaules sont défleuries comme ce bruit furtif qui descend la colline avec quelques morceaux de lune jaunie dans sa traînée” (22). La détresse devant l’impuissance à refouler la mort devenue injuste et cruelle pousse Michel Thérien à abandonner le vers pour la prose poétique monologuée sous forme de dialogue.

2. L’intemporel

La deuxième section du recueil (six pages) s’intitule “Heures immobiles.” Elle est représentative du deuil où le noir allume “des étoiles intérieures et implacables.”(27). Rien ne se dit plus, “Tes paroles sont des cailloux crachés de ton ventre parmi les livres que tu ne lis plus” (31). Plus loin on pourra lire, “Tu dis que les heures t’échappent et que tu ne sais plus compter, mais que ton corps tremble toujours au premier chant de l’oiseau” (33).

3. Les livres de l’instant

La troisième partie du recueil, “Vacarmes des heures” (six pages), nous rappelle avec une beauté extrême, remplie de passion, combien la vie fut absorbée par l’être disparu. Les heures sont regardées, apprivoisées par le bonheur de les saisir telles qu’elles se présentent, “le cœur crevé par autant de beauté. Tu sais que le fleuve les portera vers la mer. Et tu sais que tu les avais volées à la vie comme à la mort” (39). Avec...

pdf